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La traduction littéraire : un effort de réexpression et d’adaptation pour bannir les différences et rendre possible le dialogue

L’université de Chlef jouit actuellement d’un aréopage de fervents chercheurs en traduction qui n’ont de cesse de contribuer activement à la promotion de cette activité pluridimensionnelle. À travers des colloques abordant des thématiques inédites, ils questionnent de manière pertinente les dynamiques complexes de la traduction en inaugurant un champ intellectuel qui défie les frontières entre plusieurs disciplines.

Dans cette veine, rappelons entre autres la manifestation scientifique organisée par le docteur et traducteur-interprète officiel Farouk Afounas en décembre 2024. Cette rencontre a pu forger une réflexion profonde sur les multiples facettes de la traduction littéraire. Considérée comme une activité de réexpression et d’adaptation, ce type de traduction s’inscrit sciemment dans une logique de syncrétisme culturel et idéologique. Se structurant autour de plusieurs axes, la journée d’étude a retracé avec somptuosité l’épistémologie de cette tâche universelle à travers des communications prolifiques présentées dans trois langues différentes : français, anglais et arabe.

Le sacré, le choc des civilisations et la littérature de jeunesse

Lors de la séance plénière, les communicants ont confronté fructueusement leurs idées en abordant des sujets différents en rapport avec la religion, le choc des civilisations et la littérature de jeunesse qui constituent un levier de réappropriation culturel, historique et social dans le domaine de la traduction littéraire. De ce fait, le Dr Afounas Farouk a axé sa réflexion sur la question du transfert des culturèmes religieux dans la traduction arabe du roman maghrébin de graphie française en analysant la manière dont la traduction littéraire explicite la dimension religieuse du discours littéraire maghrébin. Dans une autre communication en anglais, le chercheur a amorcé la problématique de l’ambiguïté lexicale, sémantique et culturelle dans la traduction coranique. Dans la continuité de cette réflexion, la Dre Chouakri Meriem a examiné la présence des mythes et des références historiques dans trois romans de l’écrivain franco-libanais Amine Maalouf Léon l’Africain, Samarcande et Le Rocher de Tanios en montrantcomment le mythique et l’historique ensorcèlent le traducteur du texte francophone et le transforment en un admirateur de la prouesse littéraire. En passant du religieux au mythique puis à la littérature de jeunesse, la Dre Daoud Yasmine de l’institut de traduction et la Dre Seghier Meriem de l’université de Tiaret se sont penchées sur la traduction des schèmes culturels dans la littérature enfantine algérienne et le récit viatique qui se revendiquent comme une sphère de métissage interculturel par excellence. En basculant entre littérature francophone et littérature arabe, la Dre Chaal Houaria a choisi de travailler sur la traduction des œuvres littéraires du romancier égyptien Moustapha-Lutfi al-Manfaluti qui oscille entre réécriture et traduction littéral en faisant de la langue arabe un potentiel indéniable.

Traduire les maux, les concepts littéraires et la quête d’identité : de quelles compétences doit disposer le traducteur pour accomplir cette tâche complexe ?

 Les communications se rapportant à ces axes importants ont fait l’objet d’une attention particulière accordée par les chercheurs aux spécificités du processus traduisant. Dans cette optique, les Drs Benhaddi Zine El Abidine, Abdelaziz Ahmed et Bouchakour Ali ont souligné le rôle primordial de la traduction du texte littéraire dans la production des connaissances. Dans le même sillage, la Dre Mokhtari Latifa de l’École Supérieure d’économie d’Oran a traité la question de la répercussion de la linguistique textuelle sur l’acte de traduction en prenant comme exemple, le texte littéraire qui se distingue par ses spécificités discursives et ses concepts fondamentaux, comme l’ont bien démontré la Dre Djedid Sabrina de l’université de Badji Mokhtar de Annaba et le Pr Elazeri Aissa de l’université de Chlef dans leurs communications. Devant la diversité des genres, la traduction littéraire s’avère plus complexe pour ne pas dire périlleuse comme l’a bien explicité la Dre Derdour Warda dans son intervention en abordant le sujet de la traduction des maux dans le conte fantastique La Chute de la maison Usher de Charles Baudelaire. Si la littérature se revendique comme un espace thérapeutique, c’est parce qu’elle a toujours essayé d’adoucir les soucis et les tourments de l’humanité. Il en est de même pour la Dre Benderdouch Nour El Houda qui a focalisé son attention sur les enjeux politiques et idéologiques de la traduction du roman africain postcolonial en envisageant les fécondités d’une écriture réaliste et polyvalente.

La traduction littéraire à l’aune de l’intelligence artificielle

Les intervenants n’ont pas manqué d’inscrire la traduction littéraire dans le contexte actuel en établissant un dialogue effervescent entre l’acte de traduire et le numérique. À cet égard, la Dre Kbaili Fatima de l’université d’Adrar a développé une réflexion sur la traduction littéraire à l’ère du numérique en identifiant les avantages et les limites de la traduction machinale. Le même sujet a été décortiqué par les Drs Mehdi Tayeb, Meharet Sara et Hocine Naima de l’université de Chlef qui ont évalué avec perspicacité les effets de l’intelligence artificielle sur la traduction littéraire et son rôle dans l’optimisation de l’apprentissage.

En somme, les communications exposées par les chercheurs ont été d’une étonnante lucidité dans le sens où elles ont éclairé davantage les regards sur plusieurs aspects de la traduction littéraire. Soucieux de bâtir des ponts culturels inébranlables entre plusieurs champs de recherches, ils ont disséqué avec volubilité des problématiques accrues et pertinentes qui reviennent en leitmotiv pour rompre avec toute tiédeur intellectuelle. Le mérite revient donc à l’organisateur de cet évènement scientifique qui a emprunté à souhait la voie de la traduction en lui apportant des contributions remarquables.

N. E. H. B

One thought on “La traduction littéraire : un effort de réexpression et d’adaptation pour bannir les différences et rendre possible le dialogue”
  1. Ah, quelle journée détude riche en syncrétisme culturel ! On a traversé le sacré, le choc des civilisations et la littérature de jeunesse, avec une somptuosité qui aurait fait éclater les yeux dApollon. Heureusement, les chercheurs étaient là pour expliquer comment traduire les mythes, les maux et même lidentité, en se demandant si lintelligence artificielle allait devoir apprendre à adorer la prouesse littéraire. Un débat fructueux, enfin, sur le rôle primordial de la traduction dans la production de connaissances, peut-être même plus important que… eh bien, disons pas. En tout cas, un beau programme pour faire durer la vie des traducteurs !quay random

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