Lancée ce mardi 29 avril 2025 aux Assises du journalisme de Marseille (sud de la France), la Charte sur l’information et les migrations en présence de professionnels des médias, des syndicats de la profession et d’écoles de journalisme, plaide en faveur d’une «couverture médiatique précise et complète des migrations», selon ses promoteurs. Ce texte déontologique vient en réponse aux dérapages, nombreux et récurrents, de médias français et occidentaux liés surtout aux courants xénophobes dans leur traitement du phénomène migratoire en provenance du sud global notamment d’Afrique et d’Asie. A cet égard, cette charte « vise à soutenir les journalistes et les professionnels des médias dans leur souhait de proposer une couverture de qualité, précise, complète et éthique des questions migratoires, en intégrant notamment les recommandations issues de textes déontologiques de référence », lit-on dans son préambule. Elle se veut un instrument précis mis à la disposition des professionnels des médias à un moment où, précisent ses rédacteurs, « les séquences politiques de l’année 2024 ont mis en exergue la difficulté de nombreuses rédactions de traiter de manière factuelle et éclairée les questions liées aux migrations ».
Ce texte « non contraignant » s’articule autour onze principes éthiques mettant en valeur notamment «l’importance de traiter le sujet des migrations de manière transversale en prenant en compte la complexité multifactorielle des mobilités humaines, de rectifier les fausses informations, de lutter contre les stéréotypes et la stigmatisation (en ne mentionnant, par exemple, l’origine ethnique ou la religion des personnes que lorsque cela est effectivement pertinent), ou encore de respecter le droit à l’image des personnes et de toujours replacer les faits dans leur contexte ». Le vœu de tout journaliste digne de ce statut est que l’ensemble des rédactions de par le monde respectent strictement ces principes dans leur traitement de ce sujet délicat et de tous les thèmes politiques, économiques, sociaux et culturels qui font l’objet hélas de manipulations par les puissants de ce monde pour préserver leurs intérêts.
Cette charte appelle les journalistes à :
– Prendre conscience que le sujet des migrations doit être traité de manière transversale. Les causes des mobilités humaines sont complexes et multifactorielles. Les angles de traitement doivent être exigeants et refléter ces différents prismes.
– Rectifier les informations fausses ou erronées sur le sujet des migrations. Tout journaliste digne de ce nom dispose d’un droit de suite, qui est aussi un devoir, sur les informations qu’il diffuse et fait en sorte de rectifier rapidement toute information diffusée qui se révèlerait inexacte. Le travail de fact checking est recommandé pour les déclarations publiées ou prononcées par des personnalités publiques au sujet des migrations.
– Exposer les mécanismes de la désinformation et des stéréotypes sur les migrations en fournissant des informations vérifiées, sourcées et contextualisées.Un journaliste doit respecter la vérité, quelles qu’en puissent être les conséquences pour lui-même et ce, en raison du droit que le public a de connaître la vérité.
– Veiller à ne stigmatiser aucune population. Les journalistes doivent garantir que toute couverture médiatique respecte la dignité des personnes migrantes et s’interroger sur leurs propres perceptions et biais. La Charte de Marseille recommande aux journalistes de ne mentionner l’origine, la religion ou l’ethnie que s’ils estiment que cela est pertinent pour l’information du public.

– Ne pas invisibiliser les personnes migrantes. Une couverture journalistique équilibrée des migrations doit prendre soin de s’informer auprès de l’ensemble des parties prenantes, en particulier les premiers concernés.
– Être vigilant sur les termes employés. Migrant, immigré, réfugié, étranger ou demandeur d’asile n’ont pas la même signification. Les journalistes veilleront à employer les mots les plus appropriés, en se référant aux définitions juridiques et scientifiques ainsi qu’aux catégories administratives en vigueur pour éviter amalgames et approximations.
– Appliquer les règles élémentaires du droit à l’image. Les journalistes prendront les précautions qui s’imposent en s’assurant du consentement explicite et éclairé des personnes migrantes lorsqu’elles seront filmées, enregistrées ou prises en photos.
– Veiller à utiliser des images d’illustration qui reflètent la diversité des migrations. Les journalistes veilleront à rester exigeants quant à la pertinence des photos ou images d’illustration. Celles-ci doivent refléter le sujet traité de la manière la plus fidèle et la plus actuelle possible. Cela vaut aussi pour l’utilisation de banques d’images, d’archives ou d’intelligences artificielles génératives.
– Mettre en avant les faits, les replacer dans leur contexte. Les journalistes respecteront la rigueur scientifique des chiffres et des données statistiques. Ils veilleront à les mettre en perspective, afin d’éviter le « traitement au cas par cas » et d’informer au mieux sur les causes et les effets politiques, économiques et climatiques des migrations.
– Se former et former ses pairs. Les journalistes doivent avoir accès à des formations initiales et continues sur la couverture des migrations tant sur les évolutions législatives que sur les droits humains ou les travaux scientifiques les plus récents. Ces formations devraient favoriser les partages transfrontaliers (conférences académiques, séminaires rencontres professionnelles ou reportages collaboratifs avec des rédactions étrangères).
– Mesurer l’impact et perfectionner les méthodes. Les journalistes et leurs rédactions sont invités à réaliser des audits internes réguliers pour évaluer et améliorer les pratiques journalistiques en vigueur à l’aide d’outils comme des glossaires et des partages d’expérience.
Abbas M.