L'Algérie de plus près

Incultes, prétentieux et arrogants, les faiseurs de mal polluent notre société.

Par Me Mohammed Koulal

C’est en rêve seulement que les êtres nous paraissent doux et gentils. Certains nous font croire aussi qu’il est de notre intérêt de les avoir à nos côtés afin qu’un jour ou l’autre, ils puissent nous être utiles … Dans la vie réelle, ce sont des cailloux aux aspérités acérées sur lesquels on se heurte et on se blesse.

À trop vouloir impressionner les sages et les hommes d’expérience que la vie a forgés, en faisant montre de ce qu’ils possèdent comme biens matériels, les têtes vides démontrent, à l’entêtement, qu’ils n’ont aucun respect pour le savoir et le monde de la connaissance. Prétentieux, imbus de leur petite personne, leur tête vide les rend arrogants ! Ne dit-on pas que les têtes vides sont plus dangereuses que les têtes nucléaires ?

Les chercheurs en sciences du comportement proposent une approche psychanalytique de l’arrogance, considérée à la fois comme une pathologie du narcissisme et comme le révélateur des sentiments de domination. En plus de leur vanité et orgueil, ils ont le besoin d’écraser l’autre pour se sentir exister. C’est une pathologie qui a ses motivations mais qui exclut la raison. L’arrogant détenant le pouvoir est redoutable. Certains veulent dominer les autres en ignorant s’ils ont vraiment la capacité et la clairvoyance de gérer, oubliant également qu’il y a des hommes plus compétents, plus sages et plus perspicaces qu’eux. Ce genre d’individus n’est pas uniquement orgueilleux mais plutôt narcissique dans le sens mégalo.

L’énigme réside dans le fait qu’ils réussissent dans la société bien que leurs comportements soient perçus comme une offense à la raison et un outrage à l’intelligence collective. En effet, l’arrogance est une des caractéristiques que la société valorise et récompense même, particulièrement dans le domaine politique lors de toute consultation électorale. Les gens qui se mettent en avant ne sont pas, pour autant, les meilleures têtes ; bien au contraire, elles sont dépourvues de principes moraux et de respect envers autrui. Elles s’inspirent « du prince » de Machiavel. Qu’il s’agisse de gagner plus de voix dans les votes, plus de clients, les arrogants sont peu concernés par ceux qu’ils laissent derrière eux. Leur but est d’obtenir ce qu’ils désirent peu importe les moyens d’y arriver et les drames qu’ils peuvent causer aux citoyens.

Des études psychologiques ont démontré que l’arrogance reflète une qualité interpersonnelle combinée à un désir puissant et presque incontrôlable de dominer les autres. On ne peut donc qu’être frustré et souffrir de l’arrivisme et le besoin de domination de l’arrogant. Pourquoi vouloir gagner avant tout et par-dessus tout ? Les chercheurs concluent que les processus « cognitivo-motivationnels doivent en harmonie face aux opportunités qui peuvent être gagnées ou perdues ». Pour les arrogants, cela signifie que la combinaison de leurs caractéristiques sombres comme le narcissisme, la psychopathie et l’agressivité les amène à être toujours vigilants en vue d’opportunités à saisir qui leur permettent d’écraser ceux qu’ils voient comme leurs concurrents peu importe les moyens utilisés.

Ce que j’ai pu constater ces derniers jours, c’est que l’arrogant, en plus de son désir de dominer, a une sorte confiance aveugle dans sa capacité à gagner. Le comportement des arrogants dans notre société est identique à celui des enfants qui pensent détenir plus de savoir que les adultes alors qu’ils ne font qu’édifier des châteaux où ils cachent leurs craintes et leurs doutes. Il y a lieu donc de considérer l’arrogance comme une folie de domination, nonobstant l’incapacité surtout intellectuelle voire comportementale de l’arrogant. C’est un ignare qui veut enseigner la philosophie aux philosophes sans se rendre compte qu’il est la risée de la masse. L’arrogance se découvre sous différentes réalités dont on ne peut cerner tous les aspects. Elle est l’absence de la raison, elle penche vers le déraisonnable et l’irrationnel tant elle veut gérer celui qui lui est supérieur du point de vue intellect et courage. L’arrogance déroge aux normes morales.

L’arrogant, le narcissique, le psychopathe, en un mot le « fou » n’a d’autre influence que sur ceux qui l’entourent. Le reste de la société gouverné par la raison et la sagesse lui est hermétique, il ne peut l’atteindre car il est impuissant intellectuellement. Son « savoir » est insignifiant devant l’homme de raison et de sagesse. Le rôle de la société est d’écarter l’arrogant de la sphère des décisions car, de sa présence, découle l’anarchie, la corruption et le malaise socio-professionnel inextricable.

L’arrogant ne se justifie pas du fait de l’idiotie qu’il incarne dans son raisonnement, ainsi, il ne peut se référer aux jugements des intellectuels ni même se comparer à eux puisqu’il est considéré comme un individu diminué incapable de réaliser une action belle et généreuse. À défaut de capacités intellectuelles, il compense ce manque par une aptitude corporelle et vestimentaire (en un mot : matérielle) voire apparaître en compagnie des notables du village pour se fabriquer une bonne image de sa personne et gagner la sympathie de la communauté qui, elle, n’est jamais dupe.

L’arrogance ou le narcissisme sont une pathologie pour la psychologie moderne. En effet, le premier caractère est le résultat du second. Le narcissisme est l’amour qu’une personne a pour elle-même, c’est l’attention excessive portée à soi ; au fil du temps, cet amour en soi devient trop important et aura tendance à interpréter la réalité en fonction de sa propre personne. L’individu est très centré sur lui-même et a constamment besoin d’être le centre d’attention des autres. Ce genre d’individu se caractérise donc par des troubles de la personnalité et du rapport des autres, il exprime peu d’empathie envers la communauté.

L’arrogance est condamnable en Islam. En effet, il est dit : « Celui qui méprise son frère car il se considère comme plus instruit, plus sage ou plus doué que lui, est arrogant. Il l’est car au lieu de considérer Dieu comme la Source de toute la sagesse et les connaissances il se prend pour une personne de conséquence. Dieu n’a-t-il pas le pouvoir de le rendre mentalement malade et d’accorder une connaissance, une sagesse, une dextérité supérieure à son frère qu’il considérait inférieur ? De même est arrogant celui qui pense à son statut et à ses biens pour mépriser son frère bien qu’il sache que c’est Dieu Qui lui a accordé ce statut et cette grandeur. »

L’arrogance est l’art d’être fier de sa stupidité. Il est donc nécessaire de se positionner vis-à-vis de cette pathologie et avoir confiance en soi car les gens confiants agissent à partir d’un état psychologique autrement que celui des arrogants. En effet, les gens confiants se considèrent comme capables et sympathiques. Ainsi, ils sont authentiques et, tout en sachant avoir des défauts, cela ne les empêche pas d’être en harmonie avec eux-mêmes. Ils savent qu’ils ne peuvent être aimés par tout le monde et ils acceptent ce fait. Quant aux arrogants, ils se voient aussi capables que parfaits. Ils sont supérieurs à tout le monde, et tout le monde doit les aimer : mentalité exagérée générant un comportement social exagéré. Leur manque d’estime de soi laisse deviner leur complexe d’infériorité. Agissant comme s’ils étaient parfaits n’est qu’une tentative d’attirer l’attention sur eux et une reconnaissance sociale afin de compenser leur sentiment d’inadéquation.

La distinction entre les arrogants et les confiants est que :

Les confiants sont amicaux et disposés à parler à diverses personnes peu importe leur niveau et la classe sociale à qui elles appartiennent. Les arrogants choisissent les personnes en se basant sur les traits de surface tels que les apparences, les vêtements ou les symboles de l’Etat.

Les confiants aiment parler et écouter, ils cherchent à comprendre les autres. Les arrogants parlent trop et n’écoutent pas : la conversation est tout à leur sujet.

Les confiants complimentent les autres, les arrogants critiquent, se moquent ou mettent les autres dans des situations gênantes pour se sentir supérieurs.

Les confiants ressentent souvent des remords en blessant les autres et tentent de le montrer ; les arrogants mentent et manipulent.

J’espère que cette réflexion permettra aux gens de se méfier du comportement dangereux et malsain des prétentieux qui essaiment partout dans notre société. On les découvre surtout lors des élections politiques ou professionnelles. Il faut les considérer comme dangereux car quand le pouvoir est entre leur main, ils deviennent incontrôlables. En politique, ils se distinguent par leur pouvoir dictatorial et leur despotisme. Das les milieux socioprofessionnels, ils symbolisent l’ingratitude et la méchanceté. En conclusion, laissons le cœur sentir et le cerveau raisonner afin pour le bien de tous.

M. K

*Avocat à la Cour de Relizane

Agréé près la Cour Suprême et le Conseil d’Etat

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *