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La FAO alerte : la faim risque de s’installer au Yémen

La guerre en Ukraine a engendré quelques pénuries alimentaires dans certaines régions du monde, impactant fortement le niveau de vie des populations soumises à embargo. Tel est le cas des Yéménites, où les paysans subissent aussi les effets de la sécheresse.

Déjà mis à mal par plusieurs années de guerre, le Yémen craint de manquer ou d’acquérir un blé plus cher, à cause d’un autre conflit, celui en Ukraine. Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), à la suite du conflit entre Moscou et Kiev, « les prix des aliments, en particulier des céréales, sont devenus inabordables pour les familles vulnérables ».

Dans son dernier rapport de situation humanitaire au Yémen, la FAO indique ceci : « Neuf des 22 gouvernorats sont classés au niveau d’alerte élevé, en fonction des indicateurs de consommation alimentaire et des résultats en matière d’adaptation, soutenus par des indicateurs microéconomiques ».

Pour l’agence onusienne, l’insécurité alimentaire aiguë au Yémen reste « durablement élevée et dangereusement volatile malgré une diminution historique du conflit armé ». Si la trêve a permis des gains positifs grâce à l’amélioration de l’accès, de la disponibilité du carburant et de la mobilité du capital humain, le coût de la vie ne cesse d’augmenter en raison de la hausse des prix des denrées alimentaires, principalement due aux événements mondiaux.

Hausse des prix et faim

Sur les neuf gouvernorats yéménites classés en alerte élevée, quatre d’entre eux, Hodeïda, Al Jawf, Hajjah et Sa’ada, comptaient plus des deux tiers de la population en phase 3 du Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC) pour la période de janvier à mai. Cela indique « une insécurité alimentaire grave persistante » depuis le début de l’année.

Environ 40% des Yéménites sont en situation d’insécurité alimentaire, selon une évaluation nationale récente (avril 2022). Cette étude sur l’insécurité alimentaire montre que 42% des familles ont connu une insécurité alimentaire équivalente à la phase 3+ de l’IPC. Ceci est confirmé par d’autres indicateurs de consommation alimentaire. « Un pour cent de la population est confronté à une faim très grave, équivalente à la phase 5 de l’IPC », a détaillé l’agence onusienne basée à Rome.

La FAO pointe du doigt l’impact de la guerre ukrainienne sur de nombreux ménages au Yémen. Certains produits céréaliers sont devenus « inabordables » pour de nombreuses familles vulnérables. L’interdiction d’exporter imposée par des pays importateurs alternatifs comme l’Inde exacerbe encore la hausse des prix alimentaires.

L’indice FAO des prix des céréales a d’ailleurs atteint un niveau record en mai dernier et a légèrement baissé (4,1%) en juin en raison d’une chute des prix internationaux du blé.

« Depuis le début de la guerre, les négociants yéménites ont constaté une augmentation des achats en gros, ce qui a conduit à la thésaurisation et à la hausse des prix », a fait valoir la FAO dans son document.

Guerre et changement climatique, un cocktail détonnant

Par ailleurs, outre les conséquences de la guerre en Ukraine, l’impact du changement climatique continue d’affecter les moyens de subsistance. Pour la FAO, l’année 2022 reste comme la troisième année la plus sèche des quatre dernières décennies, après 2014 (la plus sèche) et 2000. Les précipitations diminuent en moyenne de 0,3 mm par an, et des schémas extrêmes, davantage de sécheresses et d’inondations, sont attendus à l’avenir.

Au cours de la première moitié de l’année, la plupart des agriculteurs ont perdu la première saison de plantation, un tiers des ménages signalant une réduction des surfaces plantées. « Les gains positifs résultant de la trêve sont évidents grâce à l’amélioration de l’accès, de la disponibilité du carburant et de la mobilité », a toutefois fait remarquer la FAO.

Dormir le ventre vide

En mai dernier, la FAO avait alerté que le Yémen est en proie à l’une des pires crises alimentaires au monde, ajoutant que la situation humanitaire est sur le point d’empirer entre juin et décembre 2022.

Le nombre de personnes qui ne seront probablement pas en mesure de satisfaire leurs besoins alimentaires minimums pourrait ainsi atteindre le chiffre record de 19 millions de personnes au cours de cette période, ont prévenu la FAO), le PAM et l’UNICEF.

Environ 1,6 million de personnes supplémentaires dans le pays tombent dans des niveaux d’urgence de la faim, portant le total à 7,3 millions de personnes d’ici la fin de l’année, ont ajouté les agences.

La FAO a révélé par ailleurs la persistance d’un niveau élevé de malnutrition aiguë chez les enfants de moins de cinq ans. Dans tout le Yémen, 2,2 millions d’enfants souffrent de malnutrition aiguë, dont près d’un demi-million d’enfants souffrant de malnutrition aiguë sévère, une « condition potentiellement mortelle ».

En outre, environ 1,3 million de femmes enceintes ou allaitantes souffrent de malnutrition aiguë. « La malnutrition aiguë chez les jeunes enfants et les mères au Yémen est en augmentation », ont alerté les trois agences onusiennes.

« De plus en plus d’enfants se couchent le ventre vide au Yémen », a déclaré Catherine Russell, Directrice générale de l’UNICEF. « Cela les expose à un risque accru de déficience physique et cognitive, voire de décès. La situation critique des enfants au Yémen ne peut plus être négligée ».

Pour l’ONU, le conflit reste le principal moteur sous-jacent de la faim au Yémen. La crise économique – un sous-produit du conflit – et la dépréciation de la monnaie ont également fait grimper les prix des denrées alimentaires en 2021 à leur plus haut niveau depuis 2015.

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