L'Algérie de plus près

Élucubrations d’un confiné : Le château de sable et la terre ancestrale

Le confinement nous a comme envoyés dans une autre dimension, une sorte d’univers parallèle, thème cher à Philip K. Dick qui hante encore le monde ici-bas avec ses histoires extraordinaires ; et c’est au milieu des derniers épisodes de la série «Le Maître du Haut Château», tirée du célèbre roman, que la triste nouvelle est tombée : le père d’A Vava Inouva nous a quittés. Soirée ramadanesque endeuillée. Soirées ramadanesques insolites en cette année du virus. Pas d’invitations à la rupture du jeûne, pas de soirées réunissant la grande famille ou en assemblées d’amis. Hors d’Algérie, vécue à Paris, la morosité de la situation est plus accentuée. Surtout si, par malheur, on est confiné seul. Est accentuée aussi la nostalgie du pays avec toutes ces chansons d’Idir qui inondent soudainement les réseaux sociaux sur internet suite à l’annonce de sa disparition. Et les lendemains n’augurent encore rien de définitivement bon. Même le déconfinement annoncé est incertain, avec des restrictions projetées qui le rendraient quasi nul. Ici et là-bas, l’avenir proche est hypothéqué. Nul ne sait quand il pourra prendre l’avion ou le bâteau pour aller de l’autre côté, revoir la terre ancestrale, retrouver des êtres chers.

Cependant, écrire ces mots, à la demande d’un ami (qu’il en soit remercié) à partir d’Alger ou d’El Asnam (ah, la malédiction !), pardon, Chlef, est une thérapie aux vertus insoupçonnées.

Encore une nuit qui s’achève, encore un jour qui s’éteint. Le jour et la nuit sont entremêlés dans une espèce de continuum. L’homme est, pour la première fois depuis qu’il a colonisé la Terre, pris par une impuissance infinie. Lui, le maître du monde paralysé par un virus! Quelle ironie du sort ! Ça fait remettre les pieds sur terre. Ça oblige à l’humilité. Cela le mènera-t-il pour autant à une prise de conscience salutaire pour la planète (et pour son futur à lui, en est-il conscient ?) et à des changements conséquents dans son modèle économique et son système d’exploitation de la nature ? Difficile d’y parier deux doros symboliques. La crise sanitaire mondiale est encore loin d’être finie que les maîtres des châteaux nous rebalancent dans « la logique économique », nous ressortent « le besoin de croissance », donc la poursuite de l’exploitation effrénée de la planète et, à terme, sa croissante dégradation peut-être jusqu’à sa destruction. Ainsi, l’œuvre humaine serait un château de sable. Et si la Terre était un corps vivant (au sens biologique du terme), l’homme serait… oui, un virus.

Cherif Berkache

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