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Confinement des élèves : «Deux trimestres devraient suffire…»

LES CITOYENS S’EXPRIMENT AU SUJET DE L’ENSEIGNEMENT EN TEMPS DE CONFINEMENT

Nous avons demandé l’avis de quelques citoyens sur la situation prévalant, notamment, dans le secteur de l’enseignement où, pratiquement, tout est l’arrêt depuis plusieurs semaines.

Beaucoup s’inquiètent du devenir des élèves et proposent des solutions médianes en insistant notamment sur la préservation de la santé des apprenants et de leurs enseignants.

Henni Douma Mouna, enseignante, quatrième année primaire :

«A mon avis, l’enseignement à distance ou à la télévision, en particulier pour les élèves du primaire, en raison de la pandémie mondiale due au virus Corona », est une solution alternative mais pas très judicieuse qui peut aboutir à un échec. Vu mon expérience dans le domaine et ce que j’ai pu observer à l’intérieur de ma classe, où je fais de mon mieux pour intéresser l’élève et capter son attention, en me tenant debout pratiquement du matin jusqu’à la fin des cours, j’ai remarqué que peu d’apprenants prennent au sérieux les cours qui leur sont dispensés. Que dire alors de leur attitude et état d’esprit quand ils sont seuls devant un écran ? Il faut à mon sens prendre les choses au sérieux en faisant en sorte que l’élève soit surveillé par ses parents pour qu’il puisse se concentrer sur les cours dispensés à distance. Avec son professeur, il y a un retour d’information. L’attention est éveillée car à chaque fois l’enseignant pose des questions, remet les rêveurs et les chahuteurs à leur place. Qui peut faire cela quand l’élève est seul devant la télé ou le micro-ordinateur ? Son père ? Sa mère ? Son grand frère ou sa sœur aînée ? Je trouve que c’est probablement une méthode qui peut s’avérer infructueuse parce que l’élève est quelque part livré à lui-même. Je pense qu’il y a beaucoup d’aspects négatifs qui méritent d’être corrigés si on adopte cette méthode. Comment ? Je ne peux le dire. A mon avis, il faut que l’année se termine et que l’on se contente seulement des deux semestres, à charge pour nous de rattraper des cours l’année prochaine».

Fatima Mahdaoui, enseignante de deuxième année primaire :

«Les élèves du primaire sont à un âge où ils ont la capacité de recevoir beaucoup d’informations et de les assimiler facilement quand, bien sûr, ces élèves vivent dans des conditions idoines. A cet âge, ils sont aussi très curieux, posent des questions et veulent savoir davantage, ce qui, parfois, nous pousse à un regain d’efforts en leur direction. Alors comment un élève qui n’a pas d’écran TV, du moins à lui seul, peut-il suivre les leçons via les chaînes satellitaires ? Sans moyens et sans préparation psychologique, peut-il comprendre et assimiler les leçons ?  Ce qui m’a poussé à me poser une question importante en tant qu’enseignante : comment mon élève Amina suivra-t-elle ses leçons alors qu’elle n’a même pas d’alarme qui la réveille le matin pour qu’elle puisse aller à l’école? Ne sera-t-elle pas étonnée de suivre ses leçons sur un écran de télévision équipé des dernières technologies et par un professeur qu’elle n’a pas jamais de sa vie ? En fait, l’éducation via la télévision est une solution alternative qui n’est pas pour résoudre le problème du rattrapage des cours et leçons en raison de la pandémie de coronavirus dans une société où la plupart des familles font partie des catégories moyennes voire pauvres.

Mohamed Abdelmeraiem, enseignant au collège :

«L’enseignement à distance en Algérie est une des décisions les plus importantes prises par le ministère algérien de l’Éducation en raison de la pandémie de coronavirus. Pour que les élèves puissent suivre les cours, en particulier le dernier trimestre des trois paliers de l’enseignement, les cours prodigués à distance ne vont pas régler le problème à 100%. Mais c’est la seule solution qui s’offre au ministère de l’Education vu les conditions que traversent le pays et le monde entier. Cette méthode n’est peut-être pas très efficace mais c’est la seule alternative qui s’offre en ces temps de pandémie. C’est une situation temporaire exceptionnelle qui nécessite un traitement approprié».

Hajar Bendjema, enseignant de troisième année :

«L’enseignement à distance, via les canaux satellites ou même sur les réseaux sociaux, peut desservir beaucoup d’apprenants et même des enseignants ; un certain groupe trouvera peut-être son compte mais la majorité en sera exclue de facto. Parfois, l’enseignant fait le plus d’efforts possibles pour transmettre le message éducatif de diverses manières, mais en fin de compte, il y a une différence dans le pourcentage qu’il espère obtenir. En tenant compte des circonstances dans lesquelles vivent la majorité des citoyens (conditions sociales concomitamment à l’épidémie de coronavirus),  l’enseignement à distance ne va certainement pas intéresser certaines catégories d’élèves et leurs parents. Avec la prolongation des vacances, il y aura beaucoup d’efforts à faire à la rentrée prochaine. Aussi, je souhaite que les cours reprennent après le confinement et que l’enseignement se poursuive même durant l’été. C’est une nécessité si on veut que les élèves évoluent».

Abdelhamid Koulala, membre de l’Association nationale des parents d’élèves :

«Le  confinement dans nos foyers nous pousse à imaginer des solutions afin que les élèves poursuivent leur cursus scolaire de manière presque ordinaire. La méthode décidée par le ministère de l’Éducation est venue à point nommée, elle va donner des résultats. L’élève, en raison du confinement, ne peut pas rejoindre son école, son enseignant non plus. Il ne peut pas en outre bénéficier de cours de soutien auprès d’un enseignant pendant cette période. Et pour cela, la meilleure option est la télévision. Comme nous l’avons noté, les professeurs qui dispensent les cours sont bons, les cours sont bien faits. La méthode va aboutir à un bon résultat, à condition toutefois que le tuteur suive et encourage son enfant, il faut qu’il l’assiste en tout temps.

En fait, la méthode utilisée par le professeur d’enseignement à distance est bonne car même s’il n’est pas accordé à l’étudiant de poser une question ou de demander une explication, tout est expliqué de manière simple et claire. Personnellement, j’ai suivi des cours de cinquième année, j’avoue que la méthode du professeur est assez bonne, ce dernier explique, développe puis donne la conclusion. Pour ce qui est de la compréhension, cela dépend de la volonté et de la disposition de l’élève et de la disponibilité des parents à motiver et aider leurs enfants. Nous devons en parallèle faire admettre à l’élève l’idée que le pays est confronté à une crise à cause de ce virus dangereux, il doit donc suivre avec attention les cours pour réussir. L’environnement doit aussi accompagner l’élève et l’exhorter à revoir ses leçons».

Propos recueillis par Halima Douma Boutaiba

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