Hamouni Mohamed, expert en sports, ancien député, conseiller au ministère de la Jeunesse et des Sports :
«Le Covid-19 menace le monde chez nous comme ailleurs, l’heure est à la lucidité et l’autodiscipline. Il ne faut surtout pas paniquer mais il convient de savoir que notre système de santé n’est pas calibré pour faire face à une évolution épidémiologique d’une telle ampleur qui est venue en vraie inconnue perturber l’équilibre économique mondial suivie de milliers de décès en l’espace d’un temps très court. Aucun pays n’était préparé pour contrer cette pandémie mortelle. On peut supposer que le dépistage, tel qu’il a été entrepris jusque-là, donne un bilan sous-évaluant la situation réelle et que le plus critique est devant nous.
Il nous faut gagner du temps pour éviter le chaos et préserver le plus possible de vies humaines. Tel qu’il est conçu, configuré et géré, notre système de santé ne peut pas faire face à la pandémie actuelle et ceci quel que soit l’engagement des personnels de santé qui relève, bien souvent, du sacrifice. Nous ne pouvons pas nous permettre les souplesses que s’accordent certains pays disposant de structures, de compétences et de programmes sanitaires qui n’existent pas chez nous.
Le minimum de matériel fait défaut. On peut donc s’attendre à devoir affronter des phases critiques dans les jours ou semaines à venir. Chez nous, plus qu’ailleurs, le confinement demeure, pour l’heure, la seule et la meilleure barrière de protection. Nous devons le répéter inlassablement et nous y résoudre avec la plus grande discipline pour limiter la propagation du virus, soulager les personnels soignants qui sont déjà au bord de la rupture, gagner du temps car des molécules pourraient être mises sur le marché à des prix abordables plus rapidement que prévu. De plus, les chaines de fabrication de masques et de respirateurs tournent à plein régime pour combler les déficits. Il ne faudrait pas que l’extension de l’épidémie, évoluant en endémie, prive l’Algérie du bénéfice de ces traitements et de ces disponibilités de moyens. Un bon confinement nous mettrait en situation de tirer le meilleur profit possible de ces avancées scientifiques et techniques.
Pendant ce temps, et pour rendre l’inoccupation plus supportable, nous pouvons transformer ce moment de retraite imposée en séquence de réflexion collective féconde.
Le confinement peut être l’occasion d’échanger dans les familles et, au-delà, par l’intermédiaire des medias indépendants ou sur la toile. En attendant il faut rester confiné chez soi pour préserver notre pays. La réponse la plus raisonnable et la plus efficace reste le confinement. J’invite les citoyens à s’y tenir, réduire leur déplacement au strict minimum et suivre fidèlement les consignes des personnels de santé dont il faut saluer le dévouement. D’aucuns avancent que la précarité du quotidien algérien, bien réelle, justifie les incitations poussant les citoyens à commettre des actes ou adopter des comportements exposant davantage leur propre vie et celle d’autrui.
Il est urgent de s’adapter. Il faut du courage, de l’intelligence et de la discipline. On peut saisir cette occasion pour que chacun, chez soi, écoute son proche et profite mieux des siens. Le moment est également propice pour développer la solidarité collective et le confinement peut être mis à profit pour réfléchir et faire réfléchir sur les origines des malheurs qui ont empêché le développement national et, trop souvent, endeuillé notre peuple. C’est une façon, parmi d’autres de nous remettre en cause.»
Propos recueillis par Hocine Boughari
Abdelkader Horr, comédien :
«Je souhaite que chacun de nous prenne ses responsabilités à travers la prévention et le confinement chez soi qui sont obligatoires pour nous tous et de suivre les consignes d’hygiène avec toute sa famille pour éviter cette pandémie qui est très dangereuse en se lavant les mains et le visage avec de l’eau et du savon, de désinfecter sa maison et son quartier, d’éviter de toucher les poignées des portes ou tout autre objets à l’extérieur avec ses mains, de ne pas serrer la main aux gens ni de les embrasser et de se tenir loin des gens. Il faut prendre conscience que cette maladie ne pardonne pas. Pour ma part, puisque l’occasion m’est donnée d’exprimer mon avis à travers votre journal Le Chélif, je lance un message à la population de Chlef pour lui conseiller de rester confinée chez elles, surtout ces prochains jours qui nous seront fatales. Restez chez vous, chers concitoyens, c’est le plus grand service que vous rendez à votre pays».
Propos recueillis par Hocine Boughari
Dr Malika Sahbi, biologiste, chargée de l’hygiène et l’environnement à l’APC de Chlef :
«Je vous avoue que certaines personnes prennent cette pandémie qui est mortelle à la légère, il faut que les autorités réagissent fermement pour obliger la population à rester en confinement total, le danger du corona Covit-19 persiste et va s’aggraver dans les prochains jours si les gros moyens de persuasion et de protection ne sont pas réunies, il faut agir très vite et prendre des mesures draconiennes pour empêcher la propagation du virus qui est invisible sur le terrain où la réalité est autre, toute lenteur sera fatale. À notre niveau, on essaye de faire avec les moyens du bord pour opérer des désinfections avec les autorités concernées et certaines associations, à l’image de l’Association des médecins privés Algériens de Chlef qui active sur le terrain depuis deux semaines, ainsi que deux associations de bienfaisance et quelques comités de quartiers pour apporter l’aide nécessaire aux familles nécessiteuses et orienter les personnes en cas de maladie vers les centres hospitaliers. Je reste convaincue que si l’Etat ne prend pas des mesures drastiques maintenant, on ne pourra plus maîtriser la situation dans les prochains jours si le virus arrive à se propager. Certes, les produits de désinfection sont disponibles malgré les retards mais ils ne règlent pas le problème définitivement. Il faut surtout organiser le mouvement des citoyens dans les lieux de regroupement tels que le marché de Hay Bensouna, supérettes, bureaux de poste etc. Nous allons intervenir encore une fois aujourd’hui dans ce marché en imposant des règles préventives et faire respecter la distance de sécurité qui pose problème. Il faut que le citoyen sache qu’il y danger imminent dans chaque regroupement. Certes, les services de sécurité sillonnent les quartiers pour inciter les gens à se confiner chez eux, mais il faut davantage de mesures dissuasives vu l’inconscience et l’insouciance chez certains et les jours à venir seront pires.
Nous avons donné ordre pour désinfecter toutes les rues et ruelles, sites et quartiers. Nous veillons 24/24 sur la santé du citoyen qui est notre mission, nous demandons simplement aux citoyens de nous aider en restant chez eux, surtout ces prochains jours qui nous seront très difficiles à gérer vu que la propagation du virus à travers les wilayas peut nous être fatale».
Propos recueillis par Hocine Boughari
Docteur Billel Bouzada, vice-président de l’Association scientifique des médecins de Chlef :
«Notre association qui active sur le terrain avec 8 médecins volontaires a tenu une première réunion avec la direction de la santé de la wilaya de Chlef le 11 mars dernier, nous avons discuté de trois points essentiels à savoir : le rôle de l’Association dans la sensibilisation, utiliser les moyens efficaces pour sensibiliser la population à travers les médias et de bouche à oreille, les moyens d’hospitalisation dans la région de Chlef face à cette pandémie et l’hygiène quotidienne pour passer directement au confinement. Nous avons par la suite une réunion avec les services de la wilaya de Chlef le 14 mars dernier pour discuter d’actions concrètes comme les sorties sur le terrain dans les grandes communes telles que Chlef, Oued Fodda, Oued Sly, Boukader, Chettia et Ténès et ce, pour insister sur le processus de désinfection des lieux ciblés avec tous les chefs de daïra. Une autre réunion avec le chef de cabinet de la wilaya a eu lieu deux jours plus tard pour accompagner les instructions indispensables de sensibilisation contre le Covid-19 en impliquant le SNAPO, le conseil des pharmaciens privés, pour trouver une solution à la pénurie des produits de protection (alcool, gel alcoolique, navettes et produits de désinfection). Le 17 mars, nous sommes sortis sur le terrain pour prendre contact direct avec la population à savoir les boulangers, les épiciers, les supérettes, les marchés de proximité, les transporteurs et nous sommes jusqu’à maintenant sur terrain en train de sensibiliser sur le confinement. Nous utilisons ces derniers temps les ambulances avec les hauts parleurs, avec les agents de sûreté de daïra, pour inciter les gens à rester chez eux.
Pour ce qui est de la situation pandémique sur l’ensemble de la wilaya, nous jouons sur les chiffres, car ce virus en Algérie est en phase exponentielle. Avant on était à 92 cas, hier on est passé à plus de 400 cas pour dire que ce virus est mortel et toujours en progression, d’où l’obligation du confinement. Pour notre part, on va faire des statistiques en comparant notre situation à celle des pays touchés par ce virus. Cela nous permettra de faire des projections sur sa progression car on est passé par la période d’incubation. Les répercussions seront visibles cette semaine, soit il va éclater, soit il sera vaincu surtout par le confinement et les mesures de protection».
Propos recueillis par Hocine Boughari