Par Hassane Boukhalfa*
Aujourd’hui, tout le monde sait que la punition est interdite. Dès qu’un enseignant met sa main sur un enfant, tout le monde accourt pour défendre l’élève, cet ange, et diaboliser l’espèce de malfrat qu’est l’enseignant. Oui, la punition est interdite, arguent ces défenseurs des opprimés. C’est la loi peut être la plus appréciée. Mais nous devons nous poser la question si cette mesure d’interdire la punition dans les établissements scolaires rend vraiment service aux élèves et aux parents ?
Aujourd’hui, l’école algérienne semble plus que jamais prendre une direction qui n’est pas la sienne. Elle semble perdre ses repères en s’engouffrant dans un tunnel aussi long que sombre. Et elle n’en sortira qu’après le retour aux bonnes règles d’antan où chacun connait son statut et son rôle. L’élève commence à empiéter sur les prérogatives de l’enseignant et ses collaborateurs. Les enseignants se font souvent petits devant certains élèves qui imposent leur dictat en s’appuyant sur les droits et en oubliant les devoirs, et des parents de plus en plus cajoleurs. L’école, cette institution où devait régner la discipline et le respect, plonge dans l’anarchie et l’indiscipline :des élèves dépassent toutes les limites sans être inquiétés outre mesure de crainte de représailles de certains parents aussi bornés qu’haineux, des professeurs humiliés, des directeurs et surveillants agressés sans aucun scrupule par des énergumènes qui se pavanent pour leurs « exploits». Les nouvelles réformes et les lois qui les ont accompagnées ont encouragé indirectement à la violence et favorisé l’insécurisé au sein de ce haut lieu d’éducation et de savoir. Ainsi, les enseignants et l’administration n’ont aucun pouvoir ni autorité sur des gamins qui se comportent comme bon leur semble.
Aujourd’hui, tout le monde sait que la punition est interdite. Dès qu’un enseignant lève la main sur un enfant, tout le monde accourt pour défendre l’élève, cet ange, et diaboliser l’espèce de malfrat qu’est l’enseignant. Oui, la punition est interdite, arguent ces défenseurs des opprimés. C’est la loi peut être la plus appréciée. Mais nous devons nous poser la question si cette mesure d’interdire la punition dans les établissements scolaires rend vraiment service aux élèves et aux parents ? Puis, nous nous interrogeons : les parents punissent-ils leurs enfant lorsqu’ils commettent une bêtise? Si oui, pourquoi leur est-il permis de le faire alors que cela est interdit à l’enseignant ou à tout autre agent de l’administration de son école ? Certains parents ont parfois jusqu’à 4, 5, voire 6 à 10 enfants, et nombreux sont ceux qui ont recours à la punition. L’enseignant, lui, prend en charge plus d’une trentaine d’élèves par classe et est obligé, en un temps limité, de dispenser son cours, ce qui exige une discipline exemplaire pour accomplir sa tâche convenablement. Sinon, à cause de l’indiscipline d’un seul élève qui fait du bruit ou qui dérange ses camarades, qui peut les perturber, c’est tout le processus d’apprentissage qui est gâché par conséquent. Ce genre de comportements deviendra une habitude chez l’enfant s’il n’est pas rappelé à l’ordre. Donc, la punition s’avère une nécessité pour mettre fin à certains comportements. Une autre question s’avère pertinente : ce qui appellent à l’interdiction de la punition ont-ils travaillé un jour dans un établissement scolaire ? Ont-ils été confrontés à une situation d’indiscipline et d’anarchie dans une classe ? Bien évidemment, la punition ne doit pas être systématique ni identique pour toutes les fautes commises par l’enfant. Tout le monde est d’accord que chaque institution ou établissement puisse se doter de ses propres règles et de son règlement intérieur qui doit être respecté, sinon c’est l’anarchie.
Pour ne pas arriver là, le contrevenant à ce règlement sera sanctionné. S’il est fonctionnaire ou employé, la sanction sera la ponction sur le salaire comme première mesure et si la faute commise est plus grave, il risque d’être poursuivi en justice. Il revient donc à chaque employé d’observer les règles pour ne pas subir ces sanctions, par conséquent la discipline sera facilement rétablie. Car toucher à la poche d’une personne est une sanction cruelle certes mais exemplaire pour éviter la récidive. Mais que doit-on faire dans un établissement scolaire avec des enfants mineurs qui ne connaissent pas ce qui est bon de ce qui est mauvais pour eux ? Ils ne risquent ni ponction sur salaire ni renvoi du travail. Pour certains élèves, être renvoyés de leur établissement est tout ce qu’ils souhaitent pour être libres, une éventualité que n’acceptera pas un employé car il doit travailler pour percevoir un salaire qui lui permette de gagner sa vie. Le patron d’une entreprise est vraiment maitre à bord chez lui contrairement à l’enseignant ou à un autre agent dans un établissement scolaire. Cela en dépit du fait que l’enseignant et l’agent ont en principe deux moyens d’exercer un pouvoir de dissuasion sur l’élève : le premier consiste à ôter ou ajouter des point, selon le cas, le second consiste à dresser des rapports pour signaler les fautes qu’il aurait commises et qui, en fin de compte, vont peser sur la suite de sa scolarité. Dans la majorité des cas, la plupart des élèves, notamment les perturbateurs qui sont justement visés par les punitions, s’en lavent les mains puisque, pour eux, ces sanctions n’ont aucun sens dans la mesure où leurs objectifs ne sont pas les études. Le résultat le plus grave auquel peuvent mener ses mesures, c’est d’être renvoyé de l’établissement et, comme nous l’avons cité plus haut, c’est ce que cherchent certains perturbateurs pour s’affranchir de ce qu’ils considèrent comme un lieu fermé. Et encore, la loi interdit de renvoyer un élève de moins de 16 ans.
Si un enseignant, un agent ou même un directeur ose aller au-delà, il risque d’être poursuivi en justice comme un vulgaire délinquant, voire un criminel, alors qu’il ne fait que corriger un criminel en devenir. Et oui, de cette façon, on est en train d’encourager l’indiscipline et l’anarchie qui mènent logiquement à la délinquance et la criminalité. Nombreux sont les parents inconscients de l’avenir de leurs enfants qui n’hésitent pas trainer un enseignant en justice alors qu’il est censé être le second père de l’élève dans notre culture et même dans notre religion. L’enseignant exhorte ses élèves à la quête du savoir, et c’est l’enseignant qui incarne ce dernier, par conséquent il doit être respecté et vénéré car il représente la lumière grâce à laquelle on distingue le bon chemin du mauvais. Il faut certes reconnaitre qu’il existe des enseignants qui ne sont pas à la hauteur de leur mission d’éducateurs, mais cela ne veut pas dire qu’il faille les diaboliser tous. Les enseignants sont choisis sur concours où l’on n’insiste pas sur les qualités morales du futur enseignant mais sur son seul niveau scientifique. Et l’on sait qu’il y a une grande différence entre le niveau scientifique et l’éducation d’une personne.
Dans la plupart des cas, on a vu des enseignants recrutés au détriment d’autres plus compétents et surtout plus éduqués et plus honnêtes. C’est un clin d’œil à la corruption qui n’a épargné aucun secteur dans notre cher pays. La corruption engendre corrupteurs et corrompus.
Revenons à notre sujet qui est l’interdiction de la punition sous toutes ses formes à l’école sous le prétexte que les élèves subissent des brutalités de la part de certains enseignants. Nous disons bien qu’ils sont minoritaires ceux qui malmènent les enfants. Il ne faut pas oublier que chacun est guidé par sa conscience, à moins qu’on n’ait laissé des malades mentaux évoluer dans un secteur aussi sensible que celui de l’éducation. Et si c’est le cas, la solution n’est pas d’interdire la punition mais plutôt de débarrasser l’école de ces malade mentaux. L’argent de l’État est plus précieux que ces enfants qu’on prétend défendre en interdisant la punition et en humiliant des enseignants devant des potaches inconscients quant à leur devenir. Combien de fois a-t-on assisté à un face-à-face entre un parent et son « chérubin » d’un côté et l’enseignant d’un autre, à cause d’une simple correction ?
Il me semble que cette mesure a eu un effet boomerang car si, auparavant, il y avait quelques enseignants ou responsables dans les établissements scolaires qui ne savent pas corriger convenablement leurs élèves en les brutalisant, aujourd’hui tout le monde est source de violence. Il ne faut pas oublier qu’un enseignant est un adulte ; donc il suffit d’une sensibilisation de la part des directeurs et inspecteurs pour réduire le phénomène, contrairement aux enfants qui sont des mineurs, ne sachant pas distinguer entre le mal et le bien, dans la mesure où une punition de la part d’un enseignant lui parait comme un fait anormal mal par la suite cela s’avère un bien pour lui. Il faut surtout que le débat soit interne c’est à-dire entre les membres de la famille éducative pour sensibiliser les enseignants et autres agents de l’administration sur la manière avec laquelle punir les élèves, imposer la discipline et faire respecter le règlement à l’intérieur des établissements.
À mon avis, l’interdiction stricte et totale de la punition dans les établissements est aussi dangereuse que le recours systématique à elle. D’après notre connaissance, la punition a existé de tout temps pour rappeler à l’ordre les personnes qui sortent du règlement tracé pour le bien de la communauté pour peu que cette punition soit juste et en adéquation avec la faute commise. À ce que l’on sait, la liberté et la dignité, au nom desquelles certains défendent ce choix, n’ont jamais signifié anarchie et irrespect d’autrui. Ce choix de créer des tensions entre les apprenants et leurs enseignants favorise un climat délétère dans les établissements sans mettre fin aux brutalités pour lesquelles a été instituée cette loi. Les apprenants voient en cette loi un moyen qui les protège de ces enseignants qui, à leurs yeux, ne sont là que pour punir des enfants. Ainsi, elle crée chez l’enfant et ses parents l’illusion d’être protégés par cette loi.
H. B.
*Ex-enseignant des lycées, doctorant.