L'Algérie de plus près

La question intéresse une majorité d’Algériens : Un deuxième mandat pour Tebboune ?

Prématuré ou non, c’est selon, le débat sur l’éventualité d’un second mandat électoral pour le président Abdelmadjid se pose déjà dans les hautes sphères de la politique. Et même dans les milieux qui se disent peu intéressés par la « politique ». Interrogés sur le sujet, des citoyens ont apporté des arguments quant à la nécessité de voir M. Tebboune briguer un second mandat. S’ils ne lui accordent pas une confiance aveugle, ils demeurent persuadés que le chef de l’Etat a beaucoup d’arguments à faire prévaloir. Ecoutons-les.  

Aomar Khennouf, retraité du secteur de l’Habitat :

D’après les propos de quelques entrepreneurs et hommes d’affaires que j’ai rencontrés ces dernières semaines, tous sont unanimes à dire qu’il y a une amélioration du climat des affaires. Notamment en ce qui concerne le taux de change et le lancement de programmes spéciaux comme celui de Tissemsilt. Certains ont investi dans l’exportation qui a enregistré des chiffres jamais égalé depuis l’indépendance (on parle de 7 milliards alors que nous n’avons jamais ou rarement dépassé 2 milliards). Néanmoins les investisseurs restent sur la défensive. S’ils ont repris confiance, le reliquat du premier mandat n’est pas assez long pour se lancer dans des projets peuvent tourner court si Tebboune n’en brigue pas un second. Dans cette éventualité, ils attendent qu’il mette les bouchées doubles pour réformer totalement (du moins lui imprimer un saut qualitatif) le système qui l’a porté au pouvoir. Voilà en résumé le point de vue de certains hommes d’affaires qui ont beaucoup souffert durant les mandats de Bouteflika. Ils sont pour un deuxième et dernier mandat.

Mohamed Adidou, retraité de l’administration des impôts

Oui, je suis OK pour un deuxième mandat pour Tebboune car il a démontré beaucoup de choses mais son projet est en route et il lui faut un second mandat pour concrétiser son travail. Il ya plusieurs projets en chantiers et dans tous les domaines : industrie automobile, technologie de pointe, emploi, la jeunesse, autosuffisance alimentaire en remplacement de l’importation. Tebboune a remédié aux lacunes héritées du régime ancien. De même, il est à espérer que sa philosophie doit être au diapason avec notre administration qui est en retard, qui marche au ralenti ; il faut une mise à jour pour éradiquer la bureaucratie …

Le peuple croit au concret, à ce qu’il vit au jour le jour et non ce qu’il a vécu auparavant …

Alors, un deuxième mandat pour Tebboune est nécessaire afin qu’on puisse voir la naissance de ses projets prometteurs d’une Algérie nouvelle …

Ouarda Baaziz, enseignante et écrivaine :

Si Tebboune se présente pour un deuxième mandat, tant que c’est pour travailler, et il l’a promis en tenant ses promesses d’œuvrer pour une Algérie nouvelle, pourquoi pas ? Toutes les personnes capables d’apporter un changement, de nous faire sortir du passé macabre et de nous enlever toutes ses séquelles, si profondes en nous-mêmes, je pense qu’un deuxième mandat est le bienvenu. Il y a eu des gens médiocres qui ont abusé de mandats et qui ne nous ont rien apporté. Alors là, quand il s’agit de quelqu’un d’honnête, qui arrive et qui commence à dépoussiérer, pourquoi pas un deuxième mandat ? Je suis partante. Il est arrivé juste au moment où on était perdu. S’il respecte la volonté du peuple, la légalité et la loi, les droits de tout un chacun comme le droit de vote notamment, s’il n’impose rien au peuple, s’il lui permet de choisir ses élus … pourquoi pas ?

Trois ans ont passé depuis son élection, mais c’est une période qui n’est pas suffisante car nous avons encore le passé attaché aux talons de nos souliers. En matière de politique sociale, des promesses ont été tenues, les Algériens se sentent plus à l’aise. Question justice, il reste beaucoup à faire parce que, dans notre pays, on n’a jamais eu une application correcte des lois. Ceux qui ont mis l’Algérie à genoux, pour ne pas dire à l’agonie, doivent être jugés et, pour ça, nous faisons confiance au président Tebboune.

Rabah Toubal, ancien diplomate :

A mon avis, sauf bilan catastrophique, qui serait unanimement établi comme tel et donc indéfendable, pour être objectivement évalué, l’action d’un Président de la République devrait couvrir au moins une décennie, la durée légale des deux mandats auxquels tout candidat à la Présidence du pays a constitutionnellement droit. Un seul mandat ne pourrait pas permettre au Président Tebboune de réaliser les objectifs qu’il s’était assignés en décembre 2019. Puisque son état de santé et le bilan de son premier mandat le lui permettent, il mérite de tenter sa chance pour obtenir, de nouveau, la confiance et donc un second mandat de la part du peuple algérien, qui consolidera certainement la cohésion, la stabilité, la sécurité et l’unité retrouvées de la nation algérienne. En 2029, le nouveau Président de la République entamera son mandat dans une meilleure visibilité que celle qui a présidé à la première mandature du président sortant.

Ferroudja Ousmer, enseignante retraitée :

Depuis des décennies, les présidents algériens ne ce sont pas contentés d’un seul mandat. On prend goût au pouvoir et on y reste ! Il est donc fort probable que le président Tebboune poursuive son aventure. Il a révisé toutes les lois sociales et économiques. Il a permis à l’Algérie de retrouver sa place dans le concert des nations. Il a donné beaucoup d’interviews, ce qui a permis de communiquer avec le peuple. La liberté d expression qui est un droit constitutionnel a cependant pris un sacré coup. Je pourrai rajouter que le point le plus fort de son mandat est d’avoir eu le courage de s’attaquer à la corruption et aux passe-droits. Son mandat n’est pas terminé pour se faire une idée précise et objective de son bilan. Et le sablier peut se retourner en un an.

Rachid Ezziane, fonctionnaire retraité :

Je pense que le fait de dire ce n’est pas encore le moment venu, c’est déjà une façon de dire : j’y vais pour un deuxième mandat. Donc, je crois qu’il consentirait à briguer un deuxième mandat. Les arguments objectifs qu’il peut avancer seraient le temps qu’il n’a pas eu pour finaliser son programme car le mandat actuel est « tronqué » par deux ans et-demi de Covid-19. Pour les réalisations, pour être objectif, je dirai quelles sont quand même positives vu la situation où il avait trouvé le pays ainsi que les aléas de la pandémie, la situation géopolitique mondiale qui a résulté de la guerre en Ukraine ainsi que les pressions pour que l’Algérie prenne position, sans oublier notre voisin de l’Ouest avec ses coups bas. Tout cela fait que l’Algérie doit d’abord concentrer ses forces sur sa stabilité et un deuxième mandat peut entrer dans cette orientation. Pour ce qui est de l’alternance au pouvoir, tout peut arriver au bon moment sans qu’il y ait brusquerie et précipitation. On doit se hâter lentement car il n’y a pas comme la paix et la stabilité pour un pays comme l’Algérie où il y a beaucoup de potentialités à faire valoir.

Salima Mimoune, ancienne cadre d’entreprise, écrivaine :

Tout ce que je peux dire, c’est que tout changement ne peut provenir que du peuple. Mais ce peuple a tellement été muselé que c’est devenu presque une seconde nature chez lui : il ne réagit plus. Tebboune, comme tous les présidents des autres pays, n’est que la partie visible d’un système, ni lui ni ce système ne voudront  lâcher le morceau, la majorité du peuple est loin de cette préoccupation étant donné la précarité dans laquelle il se trouve et ses motivations. Nous sommes arrivés à un degré d’indifférence ou « takhti men rassi w khlass »… En plus de l’instabilité actuelle dans le monde avec le planète qui explose un peu partout et les menaces qui pèsent sur l’Algérie, l’on préfère la sécurité et la continuité à un changement dont on ne connait ni la tête ni la queue… Bien sûr, ce peuple veut un changement, les réseaux sociaux sont une porte ouverte sur le monde,  mais il ne veut pas s’engager dans l’inconnu, et la récupération du hirak par des courants souvent actionnés de l’extérieur a refroidi ses ardeurs. Tebboune avec ses dernières décisions sur le plan économique et sa volonté de réduire l’isolement du pays  sur la scène diplomatique et sur le plan international, s’il ne rassure pas encore tout à fait, en tous cas, il inquiète moins que les précédents présidents.

Mazari Djamel Abdenacer, ancien marin, retraité :

A vrai dire, je ne suis pas « politique » mais je souhaiterai bien que le président Tebboune soit élu pour un second mandat afin de continuer sa mission et réaliser ce que le peuple algérien attend de lui. On ne peut pas s’attendre à ce que soient satisfaits tous les engagements pris par le président de la république en un seul mandat de cinq années. J’estime qu’il a bien entamé son travail pour redresser la situation au service de la nation et qu’il faudrait du temps pour analyser et arriver à régulariser tous les problèmes qui gangrènent le pays. Donc, je le soutiens pour un deuxième mandat tout en espérant qu’il arrivera à honorer ses engagements. Pour les arguments qu’il pourrait avancer pour se faire élire, il en a plusieurs dont la lutte contre la corruption. Gardons bon espoir !

M’hamed Mansour Boukhtache, architecte :

Comme c’est de coutume, arrivé à la fin de mandat, on est en droit de se poser des questions concernant la succession a la tête du pays, et c’est légitime, mais il y a des acteurs qui sont investis de cette mission, notamment les medias officiels lourds, même si je ne les suis pas souvent,  mais les quelques passages sur lesquels je tombe et qui parlent d’un « bilan positif » du président sortant laisse à croire qu’on est en train de préparer le terrain pour ça. Il est tout à fait naturel qu’un président en exercice, et en fin de son premier mandat, est présenté comme le premier candidat à sa propre succession, en plus ça évite aux « décideurs » les tracasseries dune nouvelle conception et fabrication d’un nouveau président.

Concernant les arguments qu’il pourrait avancer pour se représenter, tant qu’il n y a pas une presse libre, une vraie opposition, des centres d’étude et de statistiques indépendants,  il pourrait avancer des chiffres et présenter un bilan que peu de gens pourraient contredire.

je suis persuadé qu’on va parler d’amélioration de pouvoir d’achat par l’augmentation des salaires alors qu’on galère toujours pour un sac de lait introuvable ou un œuf trop cher, on parlera certainement de récupération de l’argent « du peuple » que personne ne pourra vérifier et on parlera certainement de grandes réalisations de projets, entamés depuis des années,  bref, on va tout récupérer.

Après trois ans, ce que je retiens, en tant que citoyen Algérien, essentiellement, c’est que le modèle auquel j’aspire et pour lequel je suis sorti manifester le 22 février 2019 est loin d’être une réalité, c’est peut-être même un mirage.

Propos recueillis par Ali Laïb

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