Nous avons rencontré M. Fayçal Madouche, directeur de l’agence ANSEJ de la wilaya d’Aïn Defla, qui nous a accueilli dans son bureau et qui s’est prêté aimablement au jeu des questions-réponses. M. Madouche nous a notamment expliqué le fonctionnement du dispositif de soutien à l’emploi de jeunes et le rôle de l’agence en matière d’orientation, de conseil et de suivi des jeunes promoteurs. Le directeur de l’agence a également évoqué les difficultés que rencontrent ces derniers et les mesures d’accompagnement décidées par les pouvoirs publics pour leur venir en aide. Ecoutons-le.
Quels types de crédits propose l’ANSEJ ?
Comme vous le savez, l’ANSEJ a été créée en 1996, l’agence d’Aïn Defla a été ouverte en 1998. Pour bénéficier du dispositif d’aide à l’emploi de jeunes, il faut remplir certaines conditions dont l’âge du prétendant qui doit avoir entre 19 ans et 40 ans, le diplôme ou le certificat de qualification, un apport personnel et la justification de la condition de chômeur. Parmi les crédits alloués par l’ANSEJ au demandeur, nous avons le financement triangulaire (le demandeur, l’ANSEJ et la banque), le financement bilatéral (le promoteur et l’ANSEJ) et le financement personnel dans le cas où le jeune promoteur dispose de fonds propres mais qui veut seulement bénéficier des avantages octroyés dans le cadre du dispositif. Il y a des pourcentages en termes de participation du promoteur dans chaque type de financement (le crédit sans intérêt de l’ANSEJ et le crédit bancaire). Il y a aussi des seuils (-5 millions DA et + millions DA) qui sont autorisés. En fonction des seuils, on élabore la structure de l’investissement souhaité.
A votre avis, quels sont les projets ayant réussi à Aïn Defla ? Sachant la vocation de la wilaya, est-ce qu’on peut dire que c’est le créneau qui réussit le mieux ?
Dans notre wilaya, je ne peux prétendre que tous les projets ont réussi dans ce secteur et dans d’autres, il y a des petites entreprises qui ont échoué pour diverses raisons, soit à cause du décès du promoteur, soit parce que leurs promoteurs ont eu des problèmes graves de santé physique ou mentale, soit que leurs entreprises ont été victimes de catastrophes naturelles, soit que les jeunes opérateur ont été escroqués par des fournisseurs… Ce sont des cas de force majeure qui les ont obligés à arrêter leur activité. En second lieu, il y a des entreprises qui sont en difficulté et qui ont cumulé quelques retards en matière de remboursement du crédit contracté. Nous les conseillons et les suivant pour qu’elles surmontent leurs difficultés conjoncturelles. Cependant, il y a une majorité d’entreprises qui ont réussi, notamment celles qui ont investi dans le créneau agricole comme la plasticulture, le maraichage, la location de matériel agricole…
Dans le secteur des services et des fonctions libérales, nous avons aussi des réussites comme les cabinets médicaux, les pharmacies, les bureaux d’étude, les bureaux d’architecture. Dans le bâtiment, nous avons les entreprises de construction et de travaux hydrauliques…
Il y a aussi beaucoup de réussite dans le créneau de la restauration, dans l’industrie, par exemple, la production de filtres à huile… Un jeune promoteur fabrique des filtres pour climatiseurs, un autre des gobelets alimentaires, un troisième des produits d’hygiène (mouchoirs en papier). A ces créneaux, on ajoute la maintenance des engins et véhicules, des produits électroménagers, l’installation de kits GPL. Autrement dit, nous avons des réussites dans pratiquement tous les secteurs d’activité. Je précise que toutes les activités agricoles sont financées par l’ANSEJ à l’exception de l’élevage bovin et ovin. Nous sommes en train de mener une étude pour voir la faisabilité de leur financement. Sinon, nous encourageons l’élevage caprin, l’apiculture, le maraichage, la plasticulture. Les créneaux se rapportant au transport des voyageurs ou l’hydraulique sont fermés pour le moment. Dans le secteur des transports, nous avons engagé une réflexion avec la direction des Transports de la wilaya pour étudier les besoins du secteur et agir en conséquence. Autrement dit, s’il y a un fort besoin qui s’exprime, nous allons ouvrir le créneau au financement.
Quels sont les nouveaux projets ouverts en 2020 par l’ANSEJ ?
Nous essayons d’intervenir dans pratiquement tous les secteurs et surtout dans ceux où des besoins s’expriment avec force. Dans le cadre de la nouvelle stratégie de l’agence, nous devons créer des activités en fonction de leur utilité économique et sociale exprimée par chaque commune, chaque daïra et à l’échelle de la wilaya. Aujourd’hui même, nous devons tenir une rencontre avec les services agricoles et la chambre d’agriculture de la wilaya, la conservation des Forêts et l’agence bancaire BADR.
Comment se fait l’accompagnement des promoteurs ?
Il faut savoir qu’il y a accompagnement au moment de la réalisation du projet, au moment de sa mise en exploitation et une autre après. Les missions principales de l’ANSEJ sont le conseil, l’accompagnement et le financement. Vient ensuite le suivi sur le terrain. Quand le promoteur vient vers nous, nous lui donnons toutes les informations sur le dispositif d’aide. Le jeune arrive avec une idée de projet, nous voyons s’il a un savoir-faire dans le domaine qui lui permet de mener à bien le projet et de bien le gérer. Je ne parle pas des professions libérales qui, elles sont réglementées et qui nécessitent un agrément. Nous avons une liste d’activités que nous pouvons financer. Ce n’est pas nous qui proposons, c’est le jeune promoteur qui propose l’idée qui l’intéresse. Nous, nous le conseillons surtout sur la faisabilité et la rentabilité du projet.
Quelles sont les nouvelles mesures en faveur des promoteurs ?
Il y a une convention qui a été signée entre l’ANSEJ, les banques publiques et fonds de garantie et d’assurance des crédits bancaires. Cela, pour rééchelonner les remboursements des crédits octroyés aux promoteurs qui accusent des retards de paiement. Ces promoteurs doivent venir vers nous, on leur ouvre un dossier qu’on envoie à la banque pour que cette dernière leur fasse un nouvel échéancier de paiement sans pénalités de retards et sans agios. Il y aussi une instruction de la tutelle en ce qui concerne le gel des poursuites judiciaires. Nous privilégions évidemment les règlements à l’amiable en ce qui concerne le crédit ANSEJ.
Pensez-vous élever le montant des crédits à allouer aux promoteurs, sachant qu’il y a une augmentation sensible des prix des matériels et équipements ?
Il y a un projet de décret exécutif qui apportera quelques changements et modifications au dispositif ANSEJ. En ce qui concerne le seuil, il n’y aura pas de changement, il restera plafonné à 10 millions DA. Le changement concernera les types de financement, le pourcentage, les conditions et critères d’éligibilité…
Combien de temps faut-il attendre pour bénéficier du crédit ?
La commission de sélection et de financement des projets se tient deux fois par mois. Quand un prétendant s’inscrit sur la plateforme numérique de l’ANSEJ, au plus tard, il est convoqué 15 jours après son inscription pour la validation de son dossier. Une décision lui est octroyée. 3 jours après, on lui accorde une décision de capacité, ensuite son dossier est transmis à la banque qui lui accorde son accord de financement dans un délai maximum de 70 jours… Le projet est financé dans un délai compris entre 4 et 6 mois. Il y a des projets qui mettent du temps à se concrétiser à cause de l’agrément ou des baux de location des terres agricoles…
A-t-on pensé à la numérisation des activités de l’agence ?
Nous avons mis en place une plateforme pour les inscriptions en ligne, le promoteur peut également suivre le cheminement et l’état d’avancement de son dossier étape par étape. Avec la pandémie, nous avons lancé la formation à distance. Nous avons placé mis en ligne des cours sur notre chaine Youtube sur la manière de gérer une petite entreprise. Le promoteur les suit, il se rapproche ensuite de l’ANSEJ pour subir un examen auprès de son formateur. Actuellement, il y a une plateforme de suivi des entreprises défaillantes qui permet aux promoteurs en difficultés de soumettre leurs préoccupations. Concernant les cas de force majeure (décès, maladie handicapante…), c’est le fonds de garantie des crédits qui s’en occupe ; ceux qui ont des problèmes avec les institutions et administrations publiques, c’est à nous de leur donner une réponse dans les 48 heures qui suivent au maximum. On leur notifie un email pour qu’ils se rapprochent de nos services. 7 jours plus tard, on leur envoie une convocation. S’ils ne se présentent pas dans les 7 jours, on leur transmet une autre convocation. S’ils ne viennent pas, la question est close. Dans le cas contraire, on les accompagne pour régler les problèmes qu’ils ont avec d’autres institutions (comme la CNAS, les impôts, la banque, etc.).
Pour ce qui est des entreprises qui ont réussi, il y a plusieurs conventions qui ont été signées par notre ministère avec d’autres départements concernés, entre autres, le ministère des Ressources en eau, le ministère de l’Habitat, l’ADE, la Sonelgaz, la Sonatrach, le ministère du Tourisme ; chaque département devant réserver 20% des projets publics à ces entreprises ANSEJ, notamment en matière de prestation de service.
Entretien réalisé par Ismahan Maamar Kouadri