Par Mohamed Medjahdi
L’important flux d’investisseurs étrangers en Algérie fait d’elle une destination importante pour le tourisme d’affaires. Les hôtels du groupe HTT, modernisés grâce à d’importants investissements ont permis d’améliorer les standards de confort et la qualité des prestations.
L’Algérie devrait s’orienter davantage vers le tourisme d’affaires en organisant des événements scientifiques et culturels et internationaux à même de rapporter à son économie quelque 5 milliards de dollars pour près de 4 millions de touristes, estiment des experts. 10ème grand pays dans le monde, elle doit cependant créer les conditions idoines pour accueillir les touristes et tirer profit de ses richesses naturelles, historiques et culturelles. C’est une manne pour l’État, pour les investisseurs et pour la promotion de l’emploi des jeunes, qui peut contribuer à améliorer la qualité de vie des citoyens et à ouvrir de nouvelles opportunités de coopération internationale.
Une dynamique de développement de ce secteur prometteur pour la stratégie de diversification est perceptible. On le voit à travers les efforts de modernisation engagés par l’État, par le biais du groupe public HTT (Hôtellerie Tourisme Thermalisme) qui a redoré le blason de ses structures touristiques à travers le territoire, la création d’une école supérieure de l’hôtellerie et le développement de structures hôtelières privées dans plusieurs villes du pays. Les Jeux méditerranéens de 2021, organisés à Oran, de même que les Jeux arabes, ont été une excellente opportunité pour cela. Il y a lieu donc d’adopter les méthodes managériales modernes et les nouvelles technologies en mesure de faire pleinement bénéficier le pays de ce nouveau gisement économique !
Mais pour ce faire, il faut d’abord construire cette offre et asseoir un environnement propice à l’accueil des touristes avant d’entamer des actions de communication et de promotion. C’est la réunion de ces conditions qui va construire une image lisible de la destination Algérie.
À l’heure actuelle, c’est le tourisme saharien développé notamment dans les régions du Tassili n’Ajjer et du Hoggar qui a besoin d’une campagne publicitaire et promotionnelle. Il faut signaler également que les sept pôles touristiques d’excellence, censés structurer l’activité touristique à travers le territoire algérien, ont omis d’intégrer des régions qui ont un fort potentiel touristique. Par exemple, la région de Jijel qui dispose pourtant de ressources touristiques considérables, n’a pas été retenue dans le pôle touristique Nord Est. D’ailleurs, c’est la seule région littorale qui n’a pas été retenue dans ces pôles. Il en est de même pour d’autres régions qui abritent un patrimoine non négligeable comme Sétif, Constantine, Bou-Saâda, Laghouat, Djelfa, etc. Paradoxalement, d’autres régions moins dotées en ressources touristiques sont retenues dans ces pôles comme Relizane et Aïn Defla.
De l’avis des spécialistes, les trois pôles touristiques d’excellence du nord sont dominés par la thématique balnéaire qui a rendu ces pôles monofonctionnels créant ainsi une dépendance vis-à-vis de ce type de tourisme très présent sur le bassin méditerranéen où la concurrence est déjà rude. D’où la nécessité de s’intéresser également aux régions de l’intérieur qui offrent la possibilité de développer d’autres types de tourisme (culturel, thermal, écotourisme…).


Déséquilibres entre le nord et le sud
Pour l’heure, les projets prioritaires (villages d’excellence et hôtels de chaîne internationale), censés déclencher des effets d’entraînement, concernent essentiellement les pôles du nord. Il faut noter que 95 % des investissements prévus sont concentrés dans le Nord, ce qui accentue la concentration des lits hôteliers dans cette partie du pays. En effet, les projets programmés concernent essentiellement les pôles Nord-Centre et Nord-Est, avec respectivement 48 % et 43 % des lits prévus (les 9 % restants sont prévus au pôle Nord-Ouest). Aucun hôtel de cette catégorie n’a été programmé dans les pôles du Sud. Il en est de même pour les villages touristiques d’excellence dont la quasi-totalité est projetée au niveau des pôles du nord avec une concentration au pôle Nord Centre (10 villages, 39 849 lits, soit 43 % de la capacité totale des villages). Seul le village d’excellence de Ksar Massine, à Timimoune, est prévu au pôle Sud-Ouest, dans le Touat Gourara, avec une capacité de 92 lits.
Cette répartition inégale rend moins importants les effets d’entraînement attendus au niveau des pôles n’ayant pas bénéficié de ces éléments déclencheurs. Pour que ces pôles soient générateurs d’activités, il faut qu’ils enregistrent des taux de croissance importants et des effets externes positifs supérieurs aux effets externes négatifs. Et pour que ces effets d’entraînement soient bénéfiques pour l’économie de la région dans laquelle ils se diffusent, il faut qu’il ait des entreprises et des projets à proximité pour les absorber, sinon le pôle restera isolé, sans effet d’irrigation du territoire concerné.
Les pôles touristiques d’excellence sont conçus sur la base de structures gigantesques. La capacité totale de l’ensemble des villages touristiques d’excellence s’élève à 54 171 lits. Une telle concentration en lits dans les régions littorales peut engendrer des effets environnementaux et sociaux négatifs. En plus, ces structures nécessitent des compétences managériales qui font encore défaut en Algérie.
Par ailleurs, si l’activité centrale de certains pôles est le tourisme balnéaire, la question qui se pose est de savoir comment rentabiliser leurs structures en dehors de la saison estivale ?
Pour les zones d’extension touristique (ZET), en réalité, le secteur du tourisme et de l’artisanat dispose d’un portefeuille foncier constitué de 225 zones d’expansion et sites touristiques (ZET) classées par décrets exécutifs pour une superficie globale de 56 472,06 ha, réparties à travers 34 wilayas, dont 174 ZET classées par décret n° 88-232 du 5 novembre 1988 et 31 ZET classées par décret exécutif n° 10-130 du 29 avril 2010… En outre, 156 études de classement de nouvelles ZET sont en cours.
Et pour les pôles touristiques d’excellences, la politique censée améliorer ce secteur doit se référer au Schéma Directeur de l’Aménagement Touristique (SDAT), cadre de référence qui a le mérite de poser un certain nombre d’objectifs prioritaires en coordonnant et en orientant les programmes de développement du tourisme à l’horizon 2030 ; il doit aussi dégager des objectifs liés à l’augmentation des capacités d’hébergement du pays, à la diversification de l’offre touristique, à l’amélioration de l’image de l’Algérie, à la création et à l’augmentation de l’emploi. Un appui technique et environnemental pour renforcer l’attrait naturel des wilayas touristiques s’impose. Beaucoup de choses ont été faites depuis sa mise en route, d’autres restent à faire et à compléter. Il faut libérer l’investissement de la bureaucratie et des freins, libérer les mentalités qui s’opposent à la dynamique, ainsi que le foncier qui ne doit plus être tributaire de procédures lourdes et lassantes. Il faut aller vers des cahiers des charges dans le cadre de la concrétisation réelle des projets.
La typologie touristique actuelle de notre pays se définit essentiellement par trois segments, à savoir le tourisme domestique, le tourisme de la communauté nationale ou binationale établie à l’étranger et le tourisme d’affaires. Nous pensons que nous devons bien évidemment répondre aux demandes et aux besoins de ces typologies de clientèle en essayant d’augmenter ces différents potentiels.


Quels pôles touristiques d’excellence ?
Le pôle touristique est une combinaison sur un espace géographique donné de projets touristiques de qualité (équipements d’hébergement et de loisirs) et d’activités touristiques et de circuits touristiques en synergie avec un projet de développement territorial.
Le pôle touristique est multidimensionnel ; il intègre des logiques sociales (besoins primaires de la population), culturelles, territoriales, commerciales (prise en compte des attentes du marché). Le périmètre géographique peut intégrer ou non une ou plusieurs ZET.
Le SDAT 2030 préconise la mise en tourisme de l’Algérie à travers la structuration de pôles touristiques reconnus comme modèles par le marché touristique international. Ces pôles doivent permettre de structurer le territoire algérien de façon active pour façonner « l’image touristique de l’Algérie ». La valorisation du patrimoine à des fins touristiques peut avoir des effets indéniables sur le développement d’un territoire. L’objectif principal du projet est de stimuler les incidences économiques de la patrimonialisation et plus largement d’impulser une nouvelle dynamique de développement. Le challenge est de savoir du comment développer l’image de marque de la destination Algérie.
A court terme, les pays du Maghreb offriront aux visiteurs internationaux les mêmes produits et thèmes touristiques : tourisme d’affaires, mer, soleil, désert, thermalisme et thalassothérapie, pèlerinage, histoire et culture, sport et écologie. L’Algérie a intérêt de s’intégrer dans cette dynamique internationale, elle doit passer du statut de pays émetteur à celui de pays récepteur au moins avec ses compatriotes résident à l’étranger.
Le Tourisme doit être considéré comme un secteur entier, potentiellement important d’élargissement des sources d’accumulation et de création d’emplois. Son expansion dans notre pays offrira des perspectives de développement durable et inclusif. Toutefois, des politiques intégrées et tournées vers l’avenir sont nécessaires pour veiller à ce que cet essor bénéficie davantage aux populations, aux territoires et aux entreprises.
L’amélioration des recettes en devises pour le pays et en dinars pour notre économie locale, ne doit plus être liée aux seules variations des prix des hydrocarbures sur le marché mondial. La chute vertigineuse des cours du Pétrole donne froid au dos, et complique sérieusement la situation de notre pays et met dans l’obligation nos responsables à réviser leurs prévisions budgétaires. Ce n’est pas nouveau pour notre pays, il y a de quoi avoir peur de cet avenir qui n’est pas si lointain, où il n’y aura plus pour l’Algérie de pétrole à exporter si d’autres gisements ne sont pas découverts.
La principale source de recettes qui fait vivre actuellement les 43 millions d’Algériens sera tarie. Sans vouloir dramatiser quoi que ce soit, il faut que tous les Algériens sachent la vérité sur la santé économique de leur pays.
Donc, les perspectives d’avenir pour notre économie en générale et le secteur du tourisme en particulier suggèrent de nouvelles évolutions stratégiques.
A suivre
M. M.