Dans mon village natal d’El Berardja, relevant de la commune de Labiodh Medjadja, Ennaïr (Yennayer) n’était pas qu’une simple date sur le calendrier amazigh. C’était un moment de vie, un souffle d’héritage qui réunissait familles et voisins autour d’une table généreuse et d’un feu symbolique.
Je me souviens des jours qui précédaient la fête, où l’effervescence était palpable. Les femmes du quartier s’activaient dans les cuisines, préparant les mets traditionnels avec un soin particulier. Le couscous, richement garni de légumes de saison et de viande séchée, trônait comme un roi sur la table. Il y avait aussi des galettes de semoule, des dattes sucrées et cette odeur caractéristique des épices qui semblaient raconter toute une histoire.
Ennaïr était aussi la fête des symboles. Mon père sortait un plateau d’argent, dans lequel il déposait des grains, des noix et du miel, une offrande à la prospérité et à la fertilité. À chaque fois qu’il prononçait les invocations et louanges traditionnelles à Allah, je sentais un mélange de respect et d’espoir dans sa voix.
Mais ce qui me marquait le plus, c’était l’ambiance. Les rires des enfants, les histoires racontées par les anciens autour du feu, et ce sentiment d’appartenance à une communauté qui respectait encore ses us, ses coutumes et ses traditions.
Avec le temps, la célébration d’Ennaïr a évolué. Pourtant, chaque année, quand revient ce jour, il me suffit de sentir l’odeur d’un couscous bien épicé ou d’entendre une chanson ancestrale pour être transporté dans ces souvenirs d’un Ennaïr à Berardja.
Adel M.