Région à vocation agricole, El Karima, dans la wilaya de Chlef, est connue pour sa forte production de céréales et de fourrages. Les fellahs de cette zone ne s’intéressent plus à la culture maraîchère comme auparavant et ce, à cause du manque de ressources en eau.
Ces dernières années, la faible pluviométrie a induit de manière drastique le niveau du barrage de l’oued Fodda qui est presque à sec. Le changement climatique a poussé nombre d’agriculteurs à diversifier leurs cultures alors que d’autres se voient contraints de réduire les superficies emblavées.
Kheireddine Benfriha compte parmi ces cultivateurs. Ce jeune de 38 ans, issu d’une famille de propriétaires terriens, a eu l’idée de planter du tournesol sur ses terres. Kheireddine possède une expérience non négligeable dans le domaine céréalier puisqu’il plantait jusqu’à 40 hectares en blé dur, en blé tendre et en orge. Parfois, il réservait des dizaines d’hectares à la culture de la pomme de terre. Mais, sècheresse oblige, il a fait le choix d’abandonner certaines cultures au profit d’autres, notamment le tournesol, dont les graines servent à produire de l’huile de table.
Le jeune agriculteur explique que l’idée de pratiquer ce genre de culture, qui n’est pas connu dans notre région lui est venue après la pénurie d’huile vécue en 2022. « J’étais à la fois choqué et attristé par le manque d’huile de table sur les étals des supermarchés et des supérettes, j’ai appris que ce produit est importé à l’état brut puis raffiné et mis en bouteille en Algérie… En fait, c’est une situation de dépendance totale de l’étranger ». Inacceptable pour Kheireddine : « Ce sentiment de mécontentement, ajoute-t-il, m’a poussé à faire des recherches sur la production de l’huile de table sur les réseaux sociaux, j’ai appris que les graines de tournesol produisaient des huiles de grande qualité. »
Le hasard et l’histoire
Et puis, le hasard a fait le reste : « Je suis tombé par hasard sur une annonce de l’institut d’agronomie de Médéa proposant une formation de trois jours et consacrée à la culture de tournesol, je n’ai pas hésité un moment pour m’y inscrire. Après ce stage, j’ai déposé en février 2023 un dossier auprès de la subdivision d’agriculture à El Karima pour l’acquisition de graines de tournesol. Hélas, la chose ne s’est pas réalisée et j’ai dû attendre jusqu’au mois d’avril 2024 pour, enfin, recevoir, les fameuses graines ».
Notre interlocuteur nous fait savoir que le semis du tournesol s’effectue entre le 15 mars et le 15 avril.
Le projet commença à prendre forme et Kheireddine de concrétiser petit à petit son rêve. Tous les ingrédients de la réussite étaient réunis : « J’ai beaucoup bénéficié de la formation où j’ai appris comment préparer le sol avant le semis, suivre le développement de la plante jusqu’à la cueillette ». De plus, insiste l’agriculteur, « les services d’agriculture au niveau local, de la wilaya et même ceux de l’institut national d’agronomie de Médéa se sont intéressés à mon expérience en me prodiguant de précieux conseils, c’est vraiment une fierté que nos ingénieurs et techniciens encadrent de telles activités ».
Une plante aux multiples avantages
Après 60 jours d’attente, les plantes ont fleuri et le champ s’étalant sur deux hectares, se décorait par de belles fleurs jaunes. La joie du fellah est à son comble : « Vous ne pouvez pas imaginer ce que j’ai ressenti ce matin-là… »
Selon Kheireddine, le tournesol est une plante qui a plusieurs avantages, elle donne les graines pour produire l’huile de table et, dans le même temps, elle favorise la production de miel. Une fois qu’il fleurit, le champ voit proliférer les abeilles qui viennent butiner le pollen. A cela s’ajoutent les feuilles sèches qui sont destinées à l’engraissement du bétail. Enfin, le tournesol fertilise la terre.
Aujourd’hui, Benfriha est à la phase finale de son expérience, il attendra quelques jours pour procéder à la récolte par le biais d’une moissonneuse-batteuse. Les grains seront envoyés à l’unité de trituration des oléagineuses du groupe industriel Cevital, à Bejaia.
Kheireddine espère un rendement à l’hectare satisfaisant car il compte réserver davantage d’espaces pour le tournesol l’année prochaine.
Il invite enfin les agriculteurs de sa région de se convertir à ce genre d’activite qui est moins coûteux surtout que le tournesol ne consomme pas d’eau par rapport à certains légumes et fruits comme la pomme de terre, la salade, le melon ou la pastèque.
Mostefa Mostefaï