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Abdellah Benzamia, un éducateur à l’écoute de sa société

Malgré sa forte  implication dans les réseaux sociaux où il publie chaque jour de nombreux post fort intéressants avec une richesse inégalée et une langue simple mais élégante, il n’a pas accepté facilement de nous autoriser à réaliser ce portrait. Il trouve qu’il ne mérite pas d’apparaitre sur la place publique. Certes ce n’est pas une fausse modestie tant la sincérité comme l’hypocrisie ne peuvent se cacher. De notre côté, nous trouvons que ce sont les gens de sa trempe qui doivent être sur le devant de la scène dans la mesure où la nature a horreur du vide.

La scène publique est squattée par les clowns, les arrivistes et autres opportuniste. Abdellah Benzamia est un enseignant au secondaire depuis de longues années et membre très actif sur Facebook ; avec sa verve et son esprit humoristique, il contribue à propager la culture et à sensibiliser ses followers dans les différents domaines de la vie. Ses publications sur la bigoterie ainsi que son style d’écriture plein d’humeur lui ont attiré des ennuis de la part de certaines personnes qui n’apprécient pas ce genre de publications. Sa vaste culture et son ouverture d’esprit lui ont permis d’aborder des sujets aussi différents qu’intéressants allant de la religion à la  politique en passant par la société, l’économie et le sport, le tout avec un style désopilant. Les jeux de mots, les figures de styles sont autant de moyens qu’il mobilise pour écrire ses courts textes. C’est pourquoi la lecture au premier degré est le plus souvent déconseillée pour comprendre ses messages, souvent crypté.

Issu d’une famille conservatrice et très attachée aux valeurs religieuses comme la plupart des familles algériennes, il est né en 1972 à Zeboudja, au nord de la ville de Chlef. Son frère, Mohamed Benzamia en l’occurrence, est membre de la commission de la fatwa et participe dans les émissions de la fatwa à la télévision. Après des études techniques au secondaire dans la branche industrie mécanique, il décroche son Baccalauréat et rejoint l’université de Boumerdes où il étudie la géologie et le pétrole à l’institut des hydrocarbures et de chimie. Cependant, des ennuis de santé l’empêchent de terminer ses études.

Maîtrise des langues et de la communication

 Au milieu des années 1990, il exerça comme instituteur vacataire avant  de décider  de reprendre ses études mais dans le domaine littéraire cette fois-ci. C’est ainsi qu’il décroche un second bac dans la spécialité lettres et philosophie en 1996. Il s’inscrit ensuite à l’université de Blida où il obtient une licence en langue anglaise en 2001. A l’automne de la même année, il passe un concours pour accéder au grade d’enseignant dans le cycle secondaire. Ce concours, il le réussit haut la main puisqu’il s’est classé le premier. Depuis, il exerce comme enseignant d’anglais au lycée jusqu’à aujourd’hui. En plus de la langue de Shakespeare, sa spécialité à l’université, il maitrise la langue arabe à la perfection. Au lycée déjà, il a mérité les louanges d’un enseignant de langue arabe connu par sa sévérité et sa fermeté. Abdellah était pratiquement l’unique élève qui arrivait à obtenir une très bonne moyenne dans cette matière. Son enseignant ne cessait de louer sa langue et son écriture, ce qui suscita la jalousie de quelques-uns de ses camarades. « J’ai eu toujours ce sentiment que si j’avais choisi les lettres, ce serait plus utile mais la spécialité scientifique m’aidait dans la façon et la méthode de réflexion et de raisonnement », nous a-t-il confié.

En hiver 2016, il acquiert son premier Smartphone avec lequel il a commença à inonder Facebook par ses publications de haute facture intellectuelle. Cette période a coïncidé avec son hospitalisation suite à une opération chirurgicale. Les réseaux sociaux lui ont permis de supporter sa situation ; il a ainsi ajouté un nombre important d’amis, que ce soit parmi ses connaissances ou parmi les amis « virtuels ». Mais une rare audace, un ton osé sans jamais être vulgaire, il aborde dans ses publications des sujets où il brise tous les tabous dans le but de réveiller les consciences. Cette façon de faire lui a attiré des hostilités de la part de ceux qui trouvent qu’un homme appartenant à la famille éducative ne devrait pas « commettre » ce genre de publications.

« Comme je n’aime pas suivre le troupeau, je fais face à de nombreux ennuis dans un environnement hostile à tout ce qui n’est pas conforme à ses convictions bornées », regrette-t-il. « Cependant, j’ai rencontré beaucoup d’intellectuels et enseignant universitaires qui apprécient ce que je publie et cela me remonte le moral et m’encourage à persévérer », se félicite-il.

Curieux et à l’écoute des autres

Sa vaste culture et son ouverture d’esprit sont la résultante de ses lectures aussi denses que variées car Abdellah est véritable rat de bibliothèque ; c’est un grand liseur devant l’éternel.

A cette qualité s’ajoute sa curiosité insatiable et un peu exagérée : « Quand j’étais étudiant à l’université, on m’appelait celui qui pose beaucoup de questions. Même les enseignants ont remarqué ce comportement ».

Abdellah suit régulièrement les programmes et les émissions politiques sur les chaines de télévision, notamment la chaine Al Jazeera. Il n’aime pas les sujets qui traitent du sport, même les films ne sont pas sa tasse de thé. Il s’intéresse beaucoup aux langues étrangères ; il adore surtout explorer les aspects rhétoriques des langues. « J’aurais aimé étudier la traduction ; cette spécialité m’aurait aidé à avoir un savoir global concernant ce que j’ai étudié au secondaire, technique, sciences et lettres » se désole-t-il.

Notre enseignant est aussi curieux que sociable : « Quand je me déplace dans un bus, je n’hésite pas à engager une conversation avec la personne qui s’assoit à mon côté ; même quand j’embarque quelqu’un dans ma voiture, je ne cesse de lui poser des questions, cela me permets d’apprendre beaucoup des choses de la vie », raconte-t-il.

Dans les cafés, il ne fréquente pas ses pairs du même âge ou de même niveau scolaire voire professionnel mais préfère discuter avec les plus âgés que lui pour apprendre comment ils vivaient avant, leur manière de raconter les choses, connaitre leurs familles mais aussi et surtout comprendre  la sociolinguistique du moment que leur langage demeure authentique et n’a pas été affecté par les nouveaux parlers.

Les personnes plus jeunes que lui sont aussi une source d’informations précieuses afin de savoir comment ils pensent et raisonnent afin qu’il ne devienne pas étranger à son époque. La fréquentation des plus jeunes lui permet aussi de connaitre les subtilités de leur langage.

En fait, Abdellah Benzamia aime tout savoir sur toute chose, il participe aux sorties organisées par les différents établissements, à l’instar de celle consacrée à la forêt de Bissa pour la découverte des différentes plantes. A ce propos, il nous a raconté cette anecdote : « Une fois, j’ai participé à une sortie avec les élèves, nous avons été divisés en groupes, chaque groupe est dirigé par un botaniste. Quand j’ai remarqué que celui qui était en charge de nous expliquer la leçon n’était pas compétent, je n’ai pas hésité à changer de groupe pour noyer notre spécialiste es-plantes dans un déluge de questions ».

En réponse à une question concernant l’impact des réseaux sociaux sur la vie d’aujourd’hui, notre interlocuteur juge que leur effet cela à mesurable au genre de lecture que pratiquent les Algériens et le genre de livres qu’ils achètent au Salon international du livre d’Alger (SILA). Pour lui, les conséquences négatives sur le niveau scolaire et le comportement des enfants scolarisés n’est plus à démontrer, il s’agit d’une pure perte de temps, sans aucune utilité. Les élèves arrivent en classe les matins ensommeillés sans parler du risque d’être influencés par des groupuscules qui nourrissent l’extrémisme et prêchent l’excommunication tout en les occupant avec des sujets banals. Il estime que les réseaux sociaux peuvent contribuer à propager la conscience politique mais cela n’est pas possible dans une société qui n’est pas mure car « les mouches » électroniques sont là pour avorter tout acte de sursaut salutaire.

H. Boukhalfa

Abdellah Benzamia
2 thoughts on “Abdellah Benzamia, un éducateur à l’écoute de sa société”
  1. ماشاء الله الاستاذ عبد الله الرجل الخلوق المثقف الذي تطرقتم في تقريركم لبعض جوانب حياته وشخصيته المتميزة
    يتميز عبدالله كذلك بالجرأة في طرح أفكاره وآرائه المتميزة إضافة إلى فكره الناقد
    شكرا لكم على المبادرة

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