L'Algérie de plus près

Sila 2023, mes 10 jours de bonheur

Par Aomar Khennouf*

Passé les moments d’émotion, de joie et de bonheur dans une ambiance particulière faite de retrouvailles et de rencontres avec les mordus de lecture et d’écriture, c’est le temps de faire un petit bilan.

Malgré les indicateurs qui nous font craindre l’extinction d’une partie de l’espèce humaine, les lecteurs en l’occurrence, il existe encore des poches de résistance tenaces et résilientes. Beaucoup de libraires résistent à la tentation de transformer leurs locaux en commerces plus lucratifs. Des salons du livre, plus ou moins d’envergure se tiennent régulièrement et offrent aux lecteurs l’occasion de se rapprocher de leurs écrivains, romanciers et poètes préférés. Si la palme dans l’organisation de ses manifestations revient à la Kabylie, il est à noter que celui de Chlef a pris une dimension nationale. Nous espérons que celui de Sétif lui emboite le pas et que la participation des grosses maisons d’édition lui donne l’impulsion dont elle a manqué lors de l’édition précédente. Le lectorat existe et la multitude de cafés littéraires, de rencontres et de ventes dédicaces en témoignent. Mais le Salon International du Livre d’Alger, le SILA, reste la manifestation la plus grande et la plus attendue par les inconditionnels de la lecture. Le SILA est devenue au fur à mesure de ses éditions, le rendez-vous incontournable des lecteurs et des auteurs qui fusionnent, l’espace de quelques jours, par la grâce et la magie du livre.   

Depuis que le SILA a (ré)élu domicile au niveau de la SAFEX des Pins Maritimes, je n’ai raté aucune édition. Je faisais mes razzias tranquillement, butinant les stands des exposants, chassant les dédicaces comme un adolescent fan d’autographes. N’étant plus adepte de la télévision ni de la presse, je faisais mes provisions en quantité et en qualité pour passer le reste de l’année dans ma paisible retraite sur les Hauts Plateaux loin du brouhaha général. Lors de Mes incessantes Transhumances sur les chemins de mon pays, je n’oublie jamais de mettre dans mes bagages quelques livres pour égayer mes soirées loin de mon trésor.

Cette 26ème édition avait pour moi un goût différent des précédentes. Si lire c’est déjà écrire, je me suis mis depuis quelques temps à publier sur les réseaux sociaux des retours de lecture que j’ai intitulé Mes instants littéraires. Je partageais mes impressions et ce qui me plaisais dans mes lectures, avec mes amis réels et virtuels. L’appétit venant en mangeant, en 2022 je suis passé, corps et âme, de l’autre côté du miroir ou du livre si l’on peut dire. J’ai publié un premier roman dans lequel il y a un peu d’imagination, beaucoup de choses vraies que j’ai réellement vécues et quelques ‘’fotes’’ qui seront corrigées dans la deuxième édition. Quelques jours avant l’inauguration de la 26ème édition du SILA, j’ai publié mon second récit que j’ai intitulé Rien n’arrive par hasard. J’attendais donc cette manifestation avec un double intérêt.

Le SILA, des retrouvailles et des rencontres enrichissantes

Un livre pour la postérité

En tant qu’auteur, j’avais hâte de rencontrer ceux qui ont lu mon premier roman et qui étaient impatients de connaitre la suite de mes bêtises, de mes extravagances, de mes errances, de mes amours, de mes joies et mes peines. Ils étaient nombreux et j’espère qu’ils ne seront déçus par mon second bébé. Je comprenais enfin la joie que les auteurs ressentent face à leurs lecteurs. Rien ne vaut cette lueur de bonheur qui brille dans leurs yeux au moment de signer leurs œuvres. Une dédicace, ce n’est pas uniquement quelques mots gentils, une date, un lieu et une petite signature. La dédicace immortalise la rencontre, prouve la générosité de l’auteur et atteste du transfert de propriété de l’œuvre. Le roman n’appartient plus à son auteur mais aux lecteurs. De toutes les expériences que j’ai faites dans ma vie, celle-ci est celle qui m’a donné le plus de joie et de bonheur. Quand bien même vous ayez participé à la réalisation d’ouvrages grandioses, que vous ayez enregistré d’excellents résultats, vous êtes vite oublié. Mais un livre, un roman, un ktab, quelle que soit sa modestie, vous fait entrer dans la postérité. Ton nom sera évoqué par ta descendance et la descendance de ta descendance.    

En tant que lecteur, je n’ai pas failli à ma tradition. J’ai battu mon propre record. J’achète des livres sans compter et je suis loin d’être atteint par cette habitude qu’on appelle ‘’le tsundoku’’, un terme que j’ai trouvé sur le net et qui définit ceux qui achètent des livres sans les lire. A l’exception de quelques années durant lesquelles je n’avais pas la tête à la lecture, je lisais au minimum deux à trois livres par mois. Depuis que je suis en retraite, le nombre de mes lectures a pratiquement doublé. Abibliophobe, lorsque je suis en panne de nouveaux titres, je relis les premiers romans et les premiers recueils que j’ai acheté depuis que j’ai commencé à percevoir ma bourse d’étudiant en 1977. La liste est longue et pour ne pas lasser mes lecteurs, je me limite à Nedjma de Kateb Yacine, un roman fondateur que j’ai relu je ne sais combien de fois. Et à chaque fois je découvre des choses nouvelles que j’ai survolées dans mes lectures précédentes. Malek Haddad est celui qui m’a fait découvrir et aimer notre littérature. Laadi Flici, Nouredine Aba sont plus que des poètes. Ils sont jusqu’à ce jour, mes compagnons de route et de combat.

Le réel magique

Cette année, mon butin est plus important que celui de l’édition précédente. Parmi mes cibles privilégiées, il y a les ouvrages écrits par des jeunes poètes et romanciers qui sont à leur premier ou second pas dans ce monde de la littérature et en qui je me reconnais, bien que je ne sois pas aussi jeune qu’eux. Ils représentent le plus bel espoir de notre riche et belle littérature dans sa forme d’expression plurielle. Il y a aussi, dans mes objectifs, les auteurs qui ne sont aussi jeunes que les premiers cités, peut-être pas de corps, mais d’esprit sans l’ombre d’un ‘’remords’’.  Je pense que de là où ils se reposent, dans leur éternité, tels des étoiles scintillantes dans notre firmament, nos illustres prédécesseurs qui ont donné à la littérature algérienne ses lettres de noblesse, ils ne peuvent que se réjouir. La relève, malgré les aléas de l’édition, malgré les chemins de croix qu’elle emprunte pour faire réaliser son rêve, est bien là et n’entends pas s’arrêter en si bon chemin. Parfois, dans mes divagations et mes délires au milieu des visiteurs du SILA, il me semble reconnaitre les ombres de l’Emir Abdelkader, non pas le résistant dont tout le monde connait l’histoire, mais l’Emir poète et homme de lettres, l’assoiffé de lecture et de connaissance, Mouloud Feraoun qui m’a donné le coup de pouce pour franchir le pas, Mouloud Maameri, Rachid Mimouni, dAssia Djebar, Kateb Yacine et tant d’autres. Si ce n’est qu’un délire, dans les yeux et les sourires de ceux qui les ont connus et qui m’ont honoré de leur amitié et leur présence sur le stand de mon éditeur, Les Presses du Chélif, ils étaient bien là, plus vivants que jamais.   

Durant ce SILA, je surveillais et épiais l’apparition de mes ‘’proies’’. J’attendais les journées de dédicaces de mes auteurs préférés qui sont ‘’d’ici, d’ailleurs et de nulle part’’- j’emprunte le pseudo d’une jeune constantinoise, Bouchra BENALI qui a édité son premier ouvrage pour enfant chez Qobia-  pour qu’ils me signent leurs ouvrages que j’avais acheté en librairie, que j’avais lu et qui m’ont plu, emballé, subjugué, et procuré des moments de plaisir indescriptible. Pour la circonstance j’ai déménagé une partie de ma bibliothèque de Bordj Bou Arreridj jusqu’aux Pins Maritimes. Je me permets de citer trois d’entre eux et de raconter une anecdote.

Les gens de ma génération se souviennent de M. Hachemi Souami, le journaliste présentateur du journal télévisé en français. Nonobstant sa fameuse phrase, lâchée probablement par inadvertance et qui lui valu une descente aux enfers, M. Souami était un grand ami du défunt M. Benmrah qui m’a recruté en avril 1981 au sein de la COOPEMAD-BTP qu’il dirigeait et dont il cherchait à étoffer les structures et les projets avec de jeunes cadres diplômés même sans expédience professionnelle. Il me parachuta, ainsi que quatre autres nouvelles recrues, sur la steppe, à la frontière tunisienne. Ceux qui ont lu mon premier roman ne manqueront de faire le lien entre M. Souami, M. Benmrah et un certain Weiss Djebrane qui entra dans le monde du travail avec ses deux pieds gauches.

Au stand des éditions Les Presses du Chélif

Le plein de dédicaces… et de débats

Lorsque j’ai lu Body Writing de Mustapha Belfodil, je me suis promis de lire tous ses ouvrages. Avant ce jour, je n’ai pu dénicher qu’un seul : L’archéologie du chaos (amoureux). Il me l’a signé en même temps que son dernier, Terminus Babel. Je ne désespère pas de mettre la main sur les autres, en particulier Zarta. Il faut aussi que je dise, moi le bavard impénitent, que face à celui qui timide trop, je deviens aphasique. 

Ce que je considère comme la cerise sur le gâteau ou le plus beau jour de ma vie de cette année, de ce SILA, c’est ma rencontre avec Akli Tadjer. Flânant entre les stands, il est passé devant le mien. Ce n’est pas sa silhouette, imposante quand même, ni sa calvitie assez prononcée, ni sa moustache en forme de petit guidon, qui a attiré mon attention, mais la joie non dissimulé dans son regard d’être là au milieu de cette foule bigarrée de visiteurs.  Profitant de cette aubaine, je l’ai invité à faire une halte au stand de mon éditeur. Là, il m’a signé tranquillement, les A.N.I du ‘’Tassili’’, Les thermes du paradis, Il était une fois peut-être pas, Le porteur de cartable, La reine du tango, La meilleure façon d’aimer et D’amour et de guerre, le premier volet de sa saga. Pendant qu’il me dédicaçait ses romans je le harcelais de questions auxquelles il répondait avec plaisir. Durant notre court échange, j’ai rarement senti autant d’algérianité authentique chez un auteur qui a très peu vécu dans son pays d’origine et qui ne connait de sa langue maternelle que quelques bribes.  Sur son sublime roman D’amour et de guerre dont la trame commence en 1939, il m’a dit : ‘’ beaucoup de français me disent que grâce à mes romans, ils comprennent beaucoup de choses sur l’Algérie et sur ce qui s’est réellement passé ici’’. Il m’a dit aussi que ‘’pour moi, l’entre deux guerre ce n’est pas la période qui va de 1918 à 1939 mais celle qui va de 1945 au 1er novembre 1954, date du déclenchement de la guerre d’Algérie’’.  J’aurais voulu prolonger cet instant le plus longtemps possible. Je l’ai rejoint un peu plus tard sur le stand de Casbah où il m’a dédicacé La vérité attendra l’aube et le second volet de sa trilogie, D’audace et de liberté.  

J’arrive à l’anecdote. Je ne savais plus où j’avais rangé Dis-moi ton nom folie de Linda Nawel Tebbani. Il ne faisait donc pas partie du lot des ouvrages que j’ai déménagé de chez moi jusqu’au SILA. Je ne savais pas aussi à quel moment l’auteur allait dédicacer son roman chez Frantz Fanon. Je me demandais comment faire. Alors par un heureux hasard, hasard qui n’arrive jamais par hasard, je l’ai épinglé lorsqu’elle est passée tout prêt de mon poste de guetteur, le stand D 24. Quelle chance et quel bonheur. Mais quelle malchance aussi. Non seulement je n’avais pas réussi à retrouver son merveilleux roman dans l’anarchie qui règne dans mon bureau et sur les étagères de mes bibliothèques, je n’avais, ce jour là, plus d’argent pour acheter un autre exemplaire pour qu’elle me le dédicace. Notre journaliste-caissière était absente du stand. Je n’ai pas osé demander à son éditeur qui m’a déjà offert Molière m’a tuER, de me faire crédit.  Je suis convaincu qu’il n’aurait pas hésité mais j’avais peur d’oublier d’honorer ma dette. Chose qui m’arrive souvent sous le coup de l’émotion. Alors pour pallier cette situation, Linda Nawel Tebbani m’a écrit une dédicace sur une feuille volante que j’agraferai à Dis moi ton nom folie. C’est fou mais c’est comme ça. Je me demande toujours pourquoi son roman n’a pas retenue l’attention des membres des jurys des prix Assia Djebbar et Mohamed Dib. Ils ont certainement leurs raisons. Des raisons que je ne partage pas du tout.

Des retrouvailles et des rencontres enrichissantes

En résumé, en lecteur, j’ai fait le plein avec les derniers romans publiés par mes amis, par mes auteurs préférés et par des plumes que je suis curieux de découvrir. Je cite :  Arris de Yamina Mechakra dont les deux ouvrages viennent d’être réédités, La Kafrado, sangs mêlés, terre mosaïque de Malika Chitour Daoudi, En ouvrant le livre de ma vie… de Fatiha Belkacem, Ecris mon histoirre de Fella Andaloussia, Ikigai d’Ines Hayouni, Sans l’ombre d’un remords de Manel Benchouk, Je t’attendais d’Adila Katia, Tamazgha, terre des nobles et des résistants de Farida Sahoui, Du vert, du sang et beaucoup de blancs de Salima Mimoune, La symphonie des sept nuits de Nadia Sebkhi, Voix de femmes de Nadia Belkacemi et Keltoum Deffous, Pages d’un combat pour la liberté de Houria Ait Kaci, Boussaada, Amour de Nadine de Malika Bourenane, Mémoires et souffrances d’une famille militante durant  la révolution de Khalida Guermouche, Ambitions et félonies d’Omar Kazi Tani, Les oliviers de Californie d’Abderrahmane Arab, Staten Island d’Ahmed Aroua, Nouvelles de l’infra monde de Mohamed El Keurti, Ma mère en vagues de Fateh Agrane, Les occasions perdues de Mohiedine Amimour, Les harmonies de ma bohème d’El Mahdi Berkani, Dalal Maghrabi et les autres Mourir pour la Palestine d’Amar Belkhodja, Une vie en berne de Djamel Mati, Le Nil des vivants de Mohamed Abdallah, Cœur en fragments de Yassine Abdelmalik Foudala, Et si mon père avait une âme d’enfant de Fateh Boumahdi, La crise du FLN de l’été 62 d’Amar Mohand-Ameur, Terminus Babel de Mustapha Belfodil, La récréation de Khaled Ali El Ouahed, Tant que le chien ira pieds nus de Kouider Klouche, Les jumeaux de la rue de Constantine de Rabah Toubal, Hamel suivi de la falaise de Rabah Belamri et Paris, l’autre désert de Mohamed Mokkedem. Un ami de Sidi Bel Abbes m’a offert un très bel ouvrage, Dialogues sur l’hippologie arabe de l’Emir Abdelkader et Eugène Daumas. En faisant l’inventaire de mes achats, j’ai l’impression d’avoir égaré quelques ouvrages. Ce n’est pas la première fois que cela m’arrive. Malgré cela, je pense que je suis cargué pour affronter le reste de l’année.  

Le SILA, ce n’est pas uniquement des livres, des romans, des recueils, de la littérature en général, c’est aussi l’occasion de retrouvailles chaleureuses. C’est aussi l’occasion pour que des amitiés virtuelles deviennent réelles. Ce qui me permet de mettre enfin un visage et une tête sur des noms et des pseudos. Je connais enfin dans la vraie vie Fleur de Lys, Mohamed l’asnami et Ahmed Boubekeur. Retrouver Sad Aissani, une jeune poétesse qui peine à se faire éditer et trime dans les transports depuis Sidi Aich jusqu’à Alger et partout où il y a une manifestation culturelle, est un moment de bonheur inouï. Je nomme également Mohamed Hallit, ce globe-trotter qui ne sort de sa ville chérie, Sétif, que pour ce genre de manifestation. C’était aussi l’occasion de retrouver mon éternel jeune et vieil ami Omar Kazi Tani. On s’est promis des choses, notamment celle de foutre la pagaille dans notre future résidence. On écrit nos obsessions, nos expériences, nos amours de jeunesse et de vieillesse et des choses qui ne plaisent pas toujours. Je dirais et je suis sur qu’il partage mon avis, qu’à notre âge, on s’en fiche un peu beaucoup et royalement.

L’organisation, le talon d’Achille du SILA

Mais il faut dire aussi que le SILA ce n’est pas uniquement cette merveilleuse ambiance, la joie de rencontrer les lecteurs, le plaisir d’acquérir les romans qui nous ferons oublier la morosité, l’anarchie et la désorganisation que nous vivons au quotidien. Cette désorganisation était également à l’honneur durant ce SILA. Il n’y a qu’une explication à ce phénomène qui nous caractérise et dont on s’accoutume pour survivre et s’épargner des bétabloquants et de l’insuline. C’est l’incompétence des organisateurs. Dès qu’il ya un peu plus de monde, un peu plus d’exposants, c’est la débandade. J’en déduis, en ex-gestionnaire d’entreprises, que les organisateurs ne font ni bilan, ne tirent aucune leçon des éditions précédentes et ne font aucune prévision pour parer aux faiblesses constatées afin d’améliorer l’organisation des éditions suivantes. Devant le manque ou déficit de panneaux amovibles, certains stands ont été aménagés, en dernière minute, avec des cornières soudées. Apparemment l’esthétique n’est pas leur tasse de thé. D’autres stands ont grignoté de larges pans des allées de circulations qui ont été, de ce fait, réduites au minimum. Plus de 2.5 millions de visiteurs ont été enregistrés. S’il prouve l’engouement de plus en plus grandissant pour la lecture, il a mis à nu les tares de l’organisation.

La communication est l’autre point faible de ce SILA. Il faut une longue-vue aux visiteurs pour lire les indications écrites en petit caractère sur d’immenses panneaux situés juste à l’entrée du pavillon central. Un grand nombre de panneaux à l’intérieur des halls indiquaient ‘’Espace à louer’’. C’est depuis des mois que ces espaces ont été loués. Il aurait été plus judicieux que ces panneaux indiquent à qui ils ont été loués. Cela aurait évité la perte de temps des visiteurs dans de vaines recherches.

Les agents de la sécurité, bien qu’avenants et patients devant le rush des visiteurs n’ont pas empêché les vols, non pas de livres, mais de tables. Les deux premières ont disparu du stand des éditions Les Presses du Chélif avant l’inauguration du salon et celles de Media-Index après la clôture. C’est grave et qui incriminer ? Si la question se pose, ce n’est certainement pas les visiteurs qui en sont coupables. Les visiteurs sortaient avec des sacs et des sachets bourrés de livres mais pas avec des tables pliantes sous les bras.   

Des absences qui se justifient, d’autres non…

Enfin, parlons des absences. Celle qui a fait le buzz est sans conteste l’interdiction de SILA qui a frappé la maison d’édition Koukou. Il y a des dits et des non-dits dans cette affaire. Je pense que c’est dans les non-dits qu’il faut rechercher les motifs de cette interdiction. Mais pour le savoir il faut être dans les secrets de Dieu ou… des décideurs. C’est désolant et encore plus désolants sont les dommages collatéraux que cette mesure cause aux auteurs édités par Koukou. Ils sont directement pénalisés. A défaut de vendre leurs livres, certaines plumes que j’apprécie énormément étaient présentes. Contre mauvaise fortune, elles ont fait bon cœur pour ne pas rater cet événement exceptionnel qu’elles ont attendu de longs mois durant.

Ce n’est pas la seule absence remarquable. La maison d’édition Media-Plus de Constantine n’a pas participé pour d’autres raisons. C’est l’aspect financier, le coût exorbitant que les participants paient pour la location des stands et leurs aménagements. Ayant assisté mon éditeur dans la préparation de son stand, je peux comprendre ses motifs sur lesquelles l’organisateur et les autorités doivent se pencher. Même si durant le SILA, les exposants réalisent leur meilleur chiffre d’affaire, certains ne couvrent pas leurs dépenses. Ajouter à cela la sévère crise qui sévit chez les imprimeurs, la boucle est bouclée. A cause de la pénurie de papier, d’encre et de pièce de rechange, les imprimeurs ont souffert le martyre pour satisfaire les commandes des éditeurs. Certains auteurs n’ont reçu leurs ouvrages que le troisième ou quatrième jour du SILA. Certains ont épuisé leurs stocks sans espoir de renouvellement. Militer pour une si noble cause est plus que louable. Mais lorsque les caisses sont vides, les militants sont muselés et meurent à petit feu. 

Parmi les grands absents, il y a ceux qui, pour des raisons de santé, d’éloignement ou d’autres raisons, n’ont pu partager avec leurs lecteurs, dont moi, des moments de pur bonheur. Je cite mes absents – je pense que chaque lecteur a les siens-  Rachid Boudjedra, Djamel Mati, Ahmed Bekelli, Salah Guemriche et Lazhari Labter. J’ai certainement oublié certains. Je m’excuse. Ma mémoire me joue parfois des tours. D’autres ont fait des apparitions furtives et je m’en veux de les avoir manqué.

Le rideau du SILA est tombé le 4 novembre 2023. En lecteur et auteur, mon bilan est positif. Je n’espérais autant de rencontres, de dédicaces et de ventes de mes deux romans. J’espère aussi que les remarques et observations que j’ai susmentionnées dans cet article ne soient pas interprétées comme une atteinte au moral des troupes ou relevant d’un complot ourdi contre la nation. Nous sommes des humains et par conséquent nous avons nos faiblesses. Glorifier uniquement les aspects positifs et passer sous silence l’incompétence et ce qu’elle engendre comme désagréments et mécontentements ne sert à rien. Cela ne servira qu’à perpétuer une situation qui finira par avoir raison des efforts d’amélioration auxquels nous aspirons.  En attendant le prochain, je reviens à mes amours, la lecture et l’écriture. A bientôt.

K. O.

* Auteur de : « Mes transhumances » et « Rien n’arrive par hasard », éditions Les Presses du Chélif.

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