Par Annaris Arezki
Tel un confluent, le mois de novembre 1954, porteur de message d’unité et de dignité, est une résultante de toutes les actions qui l’ont précédé. Un groupe de jeunes, mus par le courage, le sens de la justice, la dignité et l’amour du pays, las des divergences idéologiques inefficaces, décidèrent de passer à l’action, en créant un front unificateur des forces pouvant mener vers la libération de la nation (d’où le FLN), mais, convaincus que, ni les mots, ni les idées, ne peuvent, seuls, mener à bon port, leur action révolutionnaire, le comité maria le front à l’armée (d’où le FLN/ALN). Préférant mourir pour l’honneur que de vivre sous le joug de la lâcheté, ne se considérant pas pot de terre contre pot de fer, ni chat contre lion, malgré l’incommensurable différence sur le plan logistique, mais armés de foi, de courage et convaincus de la justesse de la cause, de concert ils décrétèrent le 1er novembre 1954 comme départ vers la libération, en enclenchant la lutte armée contre l’occupant, trop encombrant. Depuis cette date, que de sang, que d’encre, que d’âges, que d’hommes (dans les deux sexes) sont morts que d’autres sont nés, que d’évolutions technologiques et idéologiques… que de printemps multicolores … Mais, avons-nous respecté les martyrs qui nous ont légué un pays libre et indépendant en payant le prix plus cher : leurs vies ? Depuis novembre 1954 à ce jour (68 ans), nous avons vécu 7ans de guerre, 26 ans de monopartisme, une démocratie qui a engendré une décennie de fratricide, dont les relents persistent encore, et deux décennies de faussetés, gouvernées par la corruption, qui, sans le soulèvement populaire, ne cesserait jamais de régner. Le pluralisme (trop pluriel), malgré ses 33 ans, se cherche encore. Si nombreux qu’ils sont, les sigles engendrent d’intenses encombrements dans le peu de chemins qui mènent à la bonne gare. Autant que le 1er novembre 1954, le seul et unique objectif de la démocratie est la libération du pays. Le libérer du sous-développement après l’avoir arraché des griffes de l’occupant. Donc, nous avons besoin de chemins qui mènent vers ce but. Des partis qui proposent leurs qualités, pas de ceux qui montrent les défauts des autres. Nous avons une immense dette envers nos martyrs. Le chemin de l’indépendance était très long, pénible et douloureux. Nul de ceux qui l’ont emprunté, n’était épargné. On ne peut l’être lors qu’on marche dans une voie revêtue de : Peur, mort, faim, maladies, humiliations…. Du fœtus dans l’antre de sa mère aux maquisards en passant par les végétaux et les bêtes, chacun a goûté sa dose de souffrance. Plutôt que de perdre notre temps à chercher des solutions aux problèmes qui n’existent pas, gagnons-le en avançant vers nos convergences. Exploitons positivement nos différences et jetons les négatives dans la décharge de l’ignorance. Il est vrai que la démocratie est constituée de plusieurs chemins, mais ils mènent tous vers un même but : Notre épanouissement. Que chacun emprunte celui qui lui convient, mais, à l’arrivée, les fruits du résultat étant communs, tout le monde doit respecter celui qui a trouvé le meilleur itinéraire. Surtout ne convertissons pas, les éléments qui doivent nous enrichir, en facteurs diviseurs. Notre langue originelle, Tamazight, parce qu’elle est inscrite dans les gênes, a pu traverser des millénaires, en se transmettant de bouche à l’oreille. L’arabe, en épousant l’islam, nous avons pu la retenir par la plume après l’avoir attrapée par le calame. Quant au français, ce « butin de guerre » comme disait feu Kateb Yacine, il sert de fenêtre vers l’extérieur. Nul ne détenant les clefs du paradis, ni celles de l’enfer, et des apparences, ne pouvant distinguer celles qui masquent de celles qui interprètent la véracité des intentions, nul n’a ni le droit, ni le devoir de juger la foi de chacun de nous. Seule la conviction personnelle est déterminante. Comme tout moteur qui nécessite lubrification pour bien fonctionner, une société doit être huilée par la tolérance pour éviter les grincements à sa paix. La liberté collective étant la résultante des individuelles, le respect de l’une passe indéniablement par le respect des autres.
Maintenant que notre souveraineté ait atteint l’âge de maturité, faisons une bonne escale, regardons vers notre passé, ramassons toutes nos valeurs, dépoussiérons-les, enduisons-les d’amour, entourons-les de sciences, mettons-les dans un tapis soyeux de la culture et, ensemble, retournons notre regard dans la même direction vers l’avenir. Notre avenir.
Un million et demi de martyrs
Est, à notre mémoire, un indice.
C’est un nombre qui doit nous unir
En nous rappelant leur sacrifice.
Leur âme, ne cessera jamais de nous dire :
« Il ne faut pas que notre honneur se salisse. »
L’ingratitude obstrue les chemins de la bénédiction.
A. A.