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Cheikh Abbès Lasnami : le chantre oublié du bédoui

Cheikh Abbès Ahmed ben Mohamed est un artiste-musicien du genre bédouin, natif de la ville de Chlef, Il était connu dans le milieu artistique bédouin sous le nom de « cheikh Abbès Lasnami. »
C’était un personnage très respecté par la population de Chlef pour sa modestie et sa gentillesse ainsi qu’en témoignent toutes les personnes qui l’ont approché de son vivant. Cet artiste, au talent inné dans le genre bédouin, a connu très jeune ses moments de gloire et de grandeur pour son interprétation de ce style musical qu’il maitrisait parfaitement. Avec brio, il exécutait les morceaux les plus compliqués du répertoire bédouin lequel s’inspire de la poésie populaire algérienne. Cheikh Abbes a chanté des airs et des mélodies populaires à travers un répertoire bien fourni et bien pensé dans l’art musical bedouin. Il a adopté dès son jeune âge les instruments traditionnels dont la « gasba » (flûte de roseau) et le « guellal », (genre de derbouka allongée) qui sont à la base de l’accompagnement du chant bedouin. Cheikh Abbès a enregistré plusieurs disques vinyle et cassettes de son florissant répertoire artistique dont il ne reste malheureusement plus trace sauf chez quelques collectionneurs invétérés.
Durant sa riche carrière artistique, Cheikh Abbes s’est forgé une réputation qui a dépassé les frontières algériennes. Dans ses moments de gloire, il faisait la Une des journaux car, réellement, il représentait l’image classique du chanteur bédoui algérien. D’ailleurs, il lui est arrivé de poser comme modèle de chanteur bédouin sur des cartes postales de l’époque et cela, grâce à forte sa personnalité, son élégance et sa carrure imposante qui le rendaient photogénique
Cheikh Abbès, de son vivant, a reçu beaucoup de distinctions et de prix de la part des promoteurs de la culture en Algérie à l’occasion des grandes manifestations culturelles. Aujourd’hui, plusieurs années après son décès, qui se souvient de lui ? Nous avons complètement oublié la richesse de ses oeuvres artistiques. L’indifférence affichée à son répertoire musical et son passé artistique provient en fait de la marginalisation du genre bédoui depuis de très longues années. Aussi, le patrimoine légué comme héritage dans le « fen el bedoui » par cette personnalité demeure toujours oublié injustement. Aussi, il serait très sage de la part des gens jaloux du patrimoine culturel de la ville de Chlef et sa régionde se pencher sur le cas de Cheikh Abbès et de tous ceux qui ont contribué à l’émergence de ce genre musical authentiquement algérien. Il faut en effet établir une reconnaissance significative de sa carrière artistique en organisant au moins des journées commémoratives sur sa vie d’artiste. Evoquer le regretté cheikh Abbès, c’est aussi le réhabiliter à titre posthume à sa juste valeur et par la même, faire sortir de l’oubli des pans entiers du terroir.
H. Dahmani