La commune est sous-équipée, quasi-isolée et négligée par les pouvoirs publics
Le paradoxe, dans la wilaya de Chlef, est que la côte est laissée à l’abandon au contraire des villes et localités de la vallée du Chélif qui bénéficient des sollicitudes des autorités. La commune côtière de Ténès ne dispose ni d’hôtels ni de zone touristiques à même d’attirer les estivants. Et pour corser le tout, son port commercial est boudé par bon nombre d’opérateurs. Le nouveau maire veut mettre un terme à cette étrange et insupportable situation.
Maintenant qu’il a été installé officiellement dans ses nouvelles fonctions, le nouveau président de l’assemblées populaire communale de Ténès, M. Karim Boufades en l’occurrence, est attendu par la population sur nombre de dossiers. Outre les soucis quotidiens qui se posent à ses concitoyens, il lui faut refaire démarrer des projets de développement à l’arrêt depuis assez longtemps.
Il faut retenir que l’élection du nouveau maire de Ténès n’a pas été chose facile puisqu’elle a engagé des alliances et des jeux de coulisses qui n’ont pas fait que des heureux parmi les listes sorties vainqueurs des élections du 27 novembre dernier. Toutefois, grâce aux alliances tissées, c’est le parti « El Bina » qui s’est adjugé le poste de président de l’APC.
Ex-élu à l’assemblée populaire de wilaya (APW) où il a assumé deux mandats puis à l’APC de Ténès pour un mandat, M. Boufades semble être animé d’une volonté de bien mener cette mission, tout en étant conscient des difficultés qui l’attendent. « Il y a beaucoup de choses à faire. Je promets des actions ; la mission n’est pas facile, mais elle n’est pas impossible », nous-a-t-il confié, après qu’il eut été officiellement porté à la présidence de cette APC. « Je ferais en sorte de maintenir la cadence de développement et de remettre de l’ordre dans cette assemblée souvent confrontée à des tiraillements. La gestion de cette commune a longtemps causé des soucis aux citoyens et aux autorités de la wilaya, irritant au plus haut point ces dernières », nous dira-t-il.
Une ville côtière à la traîne
Tout d’abord, le nouveau président de l’APC nous fera remarquer que Ténès est une ville ancestrale qui a connu plusieurs civilisations, elle mérite à ce titre d’être plus développée de ce qu’elle est aujourd’hui. En matière de tourisme, Ténès est à la traine par rapport aux autres villes côtières du pays alors qu’elle dispose d’atouts indéniables pour son épanouissement. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, la commune côtière de Ténès, destination très prisée par de nombreux estivants en été, ne dispose pas d’infrastructures hôtelières répondant à la demande et aux exigences du public. L’état déplorable de l’ancien hôtel Cartena, qui surplombe la ville, en est la parfaite illustration. En effet, cet établissement, qui est tombé en ruines, attend toujours une éventuelle reprise du site pour la construction d’un nouveau complexe hôtelier, comme cela était prévu depuis bien longtemps. Les causes de ce blocage demeurent inconnues pour le moment.
Cette situation explique certainement pourquoi la ville de Ténès, à vocation pourtant essentiellement touristique, n’a bénéficié d’aucun projet dans le domaine à ce jour. Pour preuve, la nouvelle zone d’expansion urbaine située à la sortie de Ténès jusqu’à la localité d’Oued El Kessab, en est totalement dépourvue alors qu’elle devait en recevoir dans le cadre de la promotion de ce type d’investissements, du moins pour combler le déficit d’équipements touristiques sur le littoral de cette région très fréquentée durant la saison estivale.
Il faut aussi s’intéresser au sort de la Casbah (Vieux Ténès) dont les nombreux vestiges tombent en ruine malgré les appels incessants des citoyens en direction des autorités en charge de la protection du patrimoine.
Des programmes de logement « ridicules »
En matière d’habitat, la commune de Ténès a été toujours défavorisée par rapport à Chlef où des dizaines de milliers de logements sont construits régulièrement contrairement à Ténès où le nombre de logements réalisés est ridicule comparé à l’ampleur de la demande. Preuve en est, les dernières protestations de citoyens non retenus sur la liste des bénéficiaires lors de l’attribution de quelques 322 logements sociaux alors que le nombre de demandeurs excède les 7000.
« J’ai entendu souvent dire que le foncier fait défaut à Ténès mais, à bien y regarder, c’est peut-être vrai pour le centre de la ville mais pas ailleurs », précise le maire, faisant savoir que le nouveau plan directeur d’aménagement et d’urbanisme (PDAU) a touché les zones d’appui et de soutien, comme les localités de Mainis et Sidi Abderrahmane qui font partie désormais du grand Ténès.
Il ajoute : « Selon une étude faite par l’agence nationale de l’aménagement du territoire (ANAT), Ténès deviendra une grande métropole sur le littoral entre Alger et Oran et au nord de la wilaya de Chlef. C’est le rôle qu’elle devra jouer à l’horizon 2029 et pour lequel elle a déjà bénéficié de nouveaux projets infrastructurels d’envergure, tels que le dédoublement de la route nationale Ténès-Chlef, la modernisation et l’élargissement de la route Ténès-Tipasa et l’extension du port commercial et de pêche de la ville ».
D’après ses explications, le PDAU actualisé a fait ressortir de réelles disponibilités foncières qui permettront d’accueillir les nouveaux équipements publics projetés à cet effet.
« Concernant les routes, je déplore le retard enregistré dans la réalisation de l’autoroute Chlef-Ténès qui ne milite guère pour le désenclavement de la ville. Voyez vous-mêmes les embouteillages monstres entre Sidi Akkacha et Ténès au cours de la saison estivale. En effet, pour à peine 5 kms, les automobilistes sont contraints de les effectuer en deux heures », s’emporte le maire.
Chômage chronique et absence d’investissements
Pour ce qui est du secteur de la santé, M. Boufades n’a pas manqué d’exprimer sa satisfaction, affirmant que les citoyens sont bien pris en charge avec les deux hôpitaux, l’hôpital psychiatrique et la polyclinique qui sont bien équipés. Par contre, il regrette qu’en matière de propreté de la ville, beaucoup de choses restent à faire. Pour l’édile communal, « il est inadmissible que des ordures végètent toute la journée aux abords des grands axes de la ville ».
Il déplore aussi le fait que dans certains quartiers habités, les travaux d’aménagement n’ont pas encore été réalisés. Il cite entre autres le cas d’un lotissement situé juste derrière le siège de la Sonelgaz (zone ouest) où les habitants pataugent dans la boue l’hiver et respirent la poussière l’été en vivant le soir dans l’obscurité totale faute d’éclairage public.
Pour le maire, il est urgent de se pencher sérieusement sur le transport des élèves, notamment les collégiens et les lycéens, en créant de nouvelles lignes.
Bien entendu, admet M. Boufades, à l’instar des autres villes du pays celle de Ténès vit une crise chronique de chômage. Il reconnait que la plupart des habitants de la ville tirent leurs revenus de la pêche. « Pour cela, promet-il, je ne ménagerai aucun effort pour attirer les investisseurs en leur accordant toutes les facilités pour réaliser des projets et par conséquent créer de la richesse en employant la main d’œuvre locale et cela avec le soutien de la wilaya ».
Par ailleurs, le maire a été on ne peut plus clair en ce qui concerne la jeunesse locale qui représente la majorité de la population de la ville : « Je demeurerai toujours à leur écoute et je veillerai à transmettre fidèlement leurs préoccupations aux autorités de la wilaya ».
Abordant l’aspect animation culturelle et les loisirs, M. Boufades trouve injustifié que la ville sombre dans l’obscurité dès la nuit tombée. « Pour que Ténès possède une vie nocturne particulièrement active qui ravira la plupart des fêtards, d’où qu’ils viennent, il faut que toutes les autorités et la société civile s’investissent en organisant des évènements musicaux et des spectacles. Pour cela, la salle de cinéma qui a bénéficié d’un important budget pour sa rénovation sera d’un atout non négligeable pour la tenue de telles soirées artistiques », conclut-il.
Bencherki Otsmane