L'Algérie de plus près

Les adoucisseurs du langage

Par Rachid Ezziane

Comme les machines qui adoucissent l’eau et la rendent potable, les mots qu’on utilise peuvent aussi être des adoucisseurs de relation et de communication. Ces adoucisseurs « potentiels » sont très utiles dans les lieux de travail, là où les rapports (entre humains)sont nombreux et délicats. C’est dans les administrations, les entreprises, etc. que l’on a le plus besoin d’être écouté et respecté, voire reconnu comme partie prenante du milieu où l’on est. Alors, pour ce faire et ne pas se défaire, un seul chemin y mène, c’est l’art du verbe…

Oui, parler est un art comme l’est le savoir-vivre ou l’architecture. Il existe dans le langage quotidien un ensemble de petites formules ou expressions qui facilitent les rapports entre humains. C’est un sociologue américain qui les a appelés les « adoucisseurs ». Car ces mots ou expressions font le travail de l’adoucisseur, c’est-à-dire, ils « policent » les mœurs, je ne sais si le mot est juste, et les rendent plus attrayants, voire aimables.   

Voyons voir maintenant quels sont ces adoucisseurs du langage. Le « s’il vous plait !» en est un. Et il est même le plus évident dans nos conversations. Il y a aussi les différentes formes d’excuses. Comme les différentes formes de courtoisie : Merci, au revoir, je vous en prie, etc. Les mots adoucisseurs ne doivent jamais blâmer, critiquer, réclamer à haute voix et ne désignez pas votre interlocuteur par la troisième personne (il ou elle).  

Il y a de l’art de dire comme l’art d’écrire. Et ne va pas loin qui n’a pas un langage soigné. Voyez comment nos politiques, sans aucun art du langage, se fourvoient à chacune de leur sortie en public.

Autre constat : parler n’a jamais voulu dire crier. Vociférer est la méthode de ceux qui n’ont plus d’arguments. Parler lentement et en articulant bien les mots, comme la musique, adoucit les états d’âme et rend les esprits bienveillants.

Il y a aussi l’autre accessoire du langage civilisé et qui consiste, avant même de prononcer le premier mot, à bien se tenir, de maîtriser ses gestes et d’avoir un regard amical. Sans oublier, bien-sûr, le ton de votre voix… chaleureux et convaincant. Car le ton de la voix, ajouté au sourire et au regard bienveillant, apaise votre interlocuteur et lui donne de la confiance, disent les experts en la matière.

Dites-moi comment vous parlez, je vous dirai qui vous êtes. Je vous dirai même plus. Je saurai déduire de votre façon de parler vos traits de caractère. Et ce n’est pas bon pour votre prestige. Car il n’y a pas comme le mystère qui donne du respect et de la prestance. Et puis, à bien y voir, on ne parle pas aujourd’hui comme au siècle dernier. Donner des ordres à tout bout de champ ne paye plus. Et l’autorité crue n’a pas non plus bonne presse de nos jours. Il vaut mieux convaincre ou négocier ses idées que d’aller au front à la hussarde…

R. E.