Par Malek OUADDAH*
L’hygiène publique est composée de l’ensemble des moyens mis en œuvre par les pouvoirs publics pour sauvegarder et améliorer la santé des citoyens. L’origine du mot hygiène remonte à l’année 1550, il découle du mot grec hygienon, qui signifie santé. L’OMS définit la santé comme étant un état de complet bien-être physique, mental et social, ne consistant pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité, ainsi que tout ce qui œuvre au niveau individuel et communautaire en faveur de la qualité et la durée de vie.
Sous la pression de la crise du logement et l’apparition des bidonvilles en Algérie, des zones d’habitations urbaines nouvelles «ZHUN» ont été créées autour des grandes villes. Cependant, l’habitat collectif a été source de malaises et troubles sociaux par l’éclatement des relations sociales, le stress et l’apparition dans les cités dortoirs de la violence et de l’insécurité. Ces cités connaissent d’énormes dysfonctionnements dus aux multiples nuisances : cela va du voisin qui ne respecte pas la tranquillité et la quiétude du voisinage à l’absence d’aires de jeux pour les enfants qui se retrouvent dans les cages d’escaliers, sur les routes ou le parking. Toutes ces contraintes sont aggravées par la cession des biens collectifs, ce qui a donné naissance à la copropriété dont les notions élémentaires de sa gestion sont absentes. Ainsi, on habite ensemble mais personne n’est concerné par la propreté de l’espace collectif. Les dégradations sont là, on les observe sans réagir. On commence par des égratignures sur les murs et les rampes d’escaliers, des salissures dans les espaces communs et ailleurs et, pour clore le décor, les ordures ménagères sont jetées de manière anarchique et à toute heure. Il est donc temps que les habitants des cités conjuguent leurs efforts pour améliorer leur cadre de vie et cela par l’organisation des comités de bloc ou de quartier. Les administrations concernées doivent accompagner les citoyens et agir pour la prise en charge de l’environnement dans les cités.
En Algérie l’Hygiène et l’environnement enregistrent une régression très significative, due en partie à la non-implication effective et permanente de la société civile. A cela, s’ajoutent les constructions illicites, souvent sans réseaux d’assainissement et conduites d’eau potable, situation aggravée par l’implantation d’édifices publiques sans études adaptées comme les équipements de santé, les écoles et les cités d’habitations sans commodités.
Plus grave, on a fermé les yeux sur des constructions érigées dans des périmètres de sécurités, des réseaux d’eaux usées, de conduites de gaz à haute pression et sous les câbles électriques de haute tension. Cette situation que les responsables concernés feignent d’ignorer risque de provoquer de graves accidents. La mesure du danger n’est pas appréciée autant par les constructeurs que par les riverains qui bafouent la loi.
Les bureaux communaux d’hygiène
Nous assistons quasi-impuissants à l’implantation d’activités nuisibles dans nos quartiers et nos cités où fleurissent des usines et ateliers en tout genre, outre des entrepôts où sont stockées des marchandises souvent dangereuses (produits chimiques, objets en plastique, lubrifiants…). On y trouve aussi des dépôts de matériaux de construction (sable, gravier, briques, ferraille…) dont l’activité génère toutes les formes de pollution : nuisances sonores de jour comme de nuit provoquées par les engins de manutention et camions de chargement et de déchargement, soulèvement de poussière, émanation de gaz d’échappement.
Certaines écoles sont entourées de parcs sous douanes et de marchés parallèles, sources de désagréments pour les élèves et le corps enseignant. Nos sites sont devenus des parkings de bus, camions et même d’engins de travaux publics. Cela cause des problèmes quotidiens aux habitants alors que les services de sécurité sont encombrés par les multiples plaintes des citoyens. Les autorités locales sont tenues d’agir pour mettre fin à ces situations catastrophiques et dont le cout sur la santé publique et très important.
Le rôle et la place du Bureau Communal d’Hygiène (BCH) est très important. Créé en juin 1987, le bureau communal d’hygiène est placé sous l’autorité du président de l’APC, il prépare les instruments, actes et dossiers techniques requis par l’action des organes de la commune et le contrôle permanent de l’hygiène et de la salubrité publique.
Dans la réalité, les prérogatives de ces bureaux sont très réduites. Leurs agents ne sont pas protégés dans l’accomplissement de leur missions, ils subissent souvent la pression des citoyens et aussi de leur hiérarchie, qui se caractérise souvent par des positions de gestion de sa carrière politique.
Ces bureaux se limitent à dresser des procès-verbaux de constat et c’est au président de l’APC de décider de son exécution. Souvent, ces documents restent sans suite.
De même, il a été constaté que les BCH sont dépourvus de moyens adéquats de travail, sachant que l’hygiène est absente de notre culture et de nos comportements collectifs.
L’amélioration de l’hygiène passe par des opérations de sensibilisation continue à réaliser par les associations. De même, les BCH doivent inscrire dans leur programme annuel des actions de sensibilisation. Mais aussi faut-il que la réglementation soit appliquée et complétée pour faire en sorte que toute atteinte à l’hygiène et à l’environnement soit sévèrement sanctionnée par les pouvoirs publics.
L’hygiène dans les lieux publics
L’hygiène publique est un tout, elle devient une réalité lorsque les toilettes publiques sont bien entretenues, lorsque nos établissements de formation disposent de sanitaires bien entretenus avec de la l’eau permanente. Car le meilleur exemple pour inculquer les notions élémentaires demeure l’école primaire. Si cette dernière dispose des conditions appropriées, l’enfant s’habituera à la propreté et complète la pratique l’hygiène là où il se trouve. L’éducation à l’hygiène doit requérir une attention particulière au niveau des écoles primaires. A titre d’exemple, en France, durant le XIXème siècle une fiche de suivi quotidienne par enfant a été mise en place par les autorités éducatives.
Au niveau de nos hôpitaux, l’hygiène doit être un axe prioritaire. Outre sa formation, le personnel chargé de cette tâche doit être doté de moyens indispensables à la réalisation de cette importante mission de lutte contre la transmission des maladies dont les maladies nosocomiales. Ce personnel doit savoir qu’il effectue une tâche très importante dans le processus de soins. Enfin, l’hôpital doit disposer en permanence d’eau et de produits d’entretien pour assurer une prise en charges de l’hygiène.
L’hygiène dans nos restaurants et nos cafés voire dans beaucoup d’administrations publiques laisse à désirer. On trouve des cafés sans toilettes, des restaurants sans lave-main, des administrations dont les couloirs et escaliers croulent sous la saleté. Et s’il existe des toilettes à l’intérieur, celles-ci ne sont pas entretenues.
L’hygiène industrielle
L’hygiène au niveau des industries alimentaires mérite plus d’attention et des moyens approprié pour son contrôle régulier. La qualité du produit destiné à la consommation commence sur les lieux de production, d’entreposage et de transport. Malheureusement, l’hygiène est souvent absente, des sont souvent sales et circulent sans être soumis à un contrôle rigoureux.
La prise en charge de l’hygiène dans nos villes et cités nécessite des efforts conjoints et complémentaires dont l’application de la réglementation et la sensibilisation permanente à travers les divers organes des APC et autres administrations : santé, commerce, agriculture, hydraulique et, surtout, le commerçant qui doit veiller à l’hygiène dans son magasin.
Enfin, il y a l’implication permanente des comités de quartiers et des associations par des opérations de sensibilisation.
La situation provoquée par le COVID-19 nous interpelle tous pour agir avec plus de rigueur pour la santé et la sécurité du citoyen avant que cela ne devienne ingérable. Aujourd’hui, dans une situation mondiale catastrophique, il est constaté que des commerçants continuent de ne pas respecter les règles élémentaires d’hygiène, notamment le boulanger qui travaille seul, sans gants et qui remet à chaque client et le pain et la monnaie.
M. O.
*Economiste, président de l’Association de protection de l’environnement et du cadre de vie (APCE)