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Les coiffeurs se font désirer à Tissemsilt

Ils sont interdits de pratiquer leur métier en période de confinement

C’est un commerce non essentiel qui a fermé il y a plusieurs jours et pourtant il aurait bien été indispensable pour certains : le salon de coiffure. On s’est demandé comment les confinés s’en sortaient, «capillairement» parlant.

Barbe et cheveux qui poussent, pointes qui rebiquent… Avec le confinement et sans possibilité d’aller chez le coiffeur, allons-nous bientôt ressembler à John Lennon ou Yoko Ono dans les années 1960 ? Ce confinement qui va durer encore quelques semaines risque en tout cas de faire des dégâts capillaires. Que faut-il faire ? Prendre sa tondeuse ? Ses ciseaux ? On a recueilli des témoignages de jeunes de Tissemsilt qui s’en arrachent déjà les cheveux.

Sid Ahmed, jeune enseignant de langue française, hirsute et désemparé, se dit un peu préoccupé par cette question de coiffure : «Mes cheveux poussent tous les jours, encore plus vite ainsi que ma barbe. Sur ma tête, c’est la catastrophe! Ki kount ou kiwalit (comment j’étais et comment je suis)». Et il nous montre sur son smartphone une photo où il était bien coiffé et bien rasé et une autre avec son état actuel. Effectivement, c’est comme si on avait affaire à deux personnes différentes ! Et que faire alors : «Soyons patients ! Notre santé passe avant notre apparence», nous dit-il.

Azzedine, étudiant, qu’on a approché, aurait bien besoin d’un petit coup de ciseaux lui aussi. Il nous dit : «C’est vrai que je me suis regardé dans la glace et que je me suis dit que si ça va durer, il va falloir penser à la boule à zéro. C’est même peut-être l’occasion ou jamais de la tenter car c’est une coupe que je n’ai jamais faite jusqu’à maintenant et, peut-être, que je vais me plaire avec et la garder pour un bon bout de temps. Comme ça, lors de mon service militaire, inchalah, j’en serai habitué».

«On est à 30 cm du client…»

Pour Dahmane, jeune chômeur de 25 ans, le problème ne se pose pas du tout : «Je n’ai aucun souci de ce côté-là dans la mesure où j’ai un ami coiffeur que je contacte, il vient chez moi pour me faire mon tour d’oreilles comme je l’ai toujours fait dans son salon de coiffure», nous dit-il.

Ce n’était pas du tout le cas pour Hamza qui portait une casquette et à qui on avait demandé ceci : «Qu’est ce qui s’est passé exactement ? On nous a dit que tu as complètement raté ta coupe». Il nous salua en relevant la casquette : «Effectivement, nous dit-il avec un soupir qui en dit long, on a une tondeuse chez nous et j’ai demandé à ma mère de jouer le rôle de coiffeur de substitution. Malhabile, elle m’a dessiné cette carte géographique que vous voyez sur ma tête. Donc j’étais obligé de la camoufler avec une casquette le temps que les choses reviennent à la normale avec l’ouverture des salons de coiffure».

Les coiffeurs de leur côté souffrent énormément de la fermeture de leurs salons et se disent très affectés par cette situation qui a touché directement leurs poches. Si pour certains qui ont pris le risque de travailler clandestinement, la majorité respectent les mesures de prévention et a rangé carrément ses outils.

 «Coiffer des gens, c’est être en contact direct avec eux, on est à 30 ou 40 centimètres du client. On utilise les mêmes outils pour tous les clients. On ne sait pas ce qu’on peut attraper ou transmettre!  Tous les coiffeurs sérieux appliquent cette fermeture, je ne travaille plus depuis trois semaines, je ne coiffe même pas dans ma famille, mais les gens continuent à appeler. Certains ne comprennent toujours pas que c’est dangereux pour eux comme pour nous», témoigne Abdelkader, professionnel expérimenté qui reçoit encore 5 ou 6 demandes quotidiennes.

Rabah Saadoun

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